Il y interprétait son propre rôle et faisait surtout jouer ses chevaux.
Pendant cinq semaines, entre Charles AZNAVOUR et l’actrice italienne Ottavia PICCOLO, Roland DUPUY a, peut-être rêvé, d’Hollywood et des terrasses du CARLTON, baignées de lumières et envahies de créatures superbes, mais le soir en regagnant la sansouïre du Grand Badon, il trouvait bien des avantages à la vie de gardian.

Pourtant s’il en est un qui pourrait être amer en parlant de son métier, c’est bien Roland DUPUY peu épargné par les accidents et la maladie.

Amateur chez Jeannot CAMBI, puis chez LAURENT.
Bayle gardian chez LAURENT, puis chez CUILLE, il a connu trois manades dirigées chacune par des hommes à la forte personnalité.
Dans chacune de ces manades, il a surveillé, conduit et trié des taureaux célébres : LIBERTIN (Cambi) dans les années 1965-1970, GOYA (Laurent) et ROUSSET (Caillé).

Homme de chevaux et de taureaux, épris d’espace et de liberté, indépendant, épicurien, Roland DUPUY ne peut se passer, ni des marais, ni des galops de chevaux sauvages au soleil couchant.

Jean Lafont prépare la saison 86, une saison chargée pour lui tant avec ses taureaux, qu’avec la direction des arènes de Nîmes.
Passer quelques heures en compagnie d’un gardian est une aventure merveilleuse car on y découvre non seulement la pratique d’un métier dur et difficile mais également les côtés d’une vie sans contrainte faite de liberté et de passion pour les taureaux et les chevaux.
Yvan AUDOUARD [1] qualifie cet état de « passion déraisonnable, comme toutes les passions et que rien ne laisse prévoir ».

En effet comment peut-on qualifier cette vie menée au milieu des paluns avec pour unique horizon la sansouïre et le marais où pataugent des taureaux.
Mais pour ces hommes, le taureau est une façon et une raison de vivre.

Bien souvent cette passion est « héréditaire ».
On est manadier de père en fils (normal) et gardian de père en fils.
Roland DUPUY, bayle gardian à la manade Cuillé est une exception, ses parents ne sont pas dans le milieu taurin, son seul atout, si je peux dire, c’est de naître à Tarascon.

Tout jeune, il a la passion des chevaux (passion qu’il nourrit toujours (1985, NdR) avec beaucoup de fidélité).
En Camargue, les chevaux mènent naturellement aux taureaux et en 1970, Roland DUPUY se retrouve, avec quelques copains, amateur à la manade Jeannot CAMBI, installée alors à l’Etourneau.

La passion des taureaux vient avec Libertin âgé de 9 ans et au sommet de sa gloire.
Cocardier respecté, aux impressionnants coups de barrière, le pensionnaire de Jeannot Cambi connaîtra le plus beau de ses combats en Arles pour la finale du 20e Trophée Taurin.
Sorti en première position, Libertin opposera toute sa vaillance et son métier aux assauts répétés des raseteurs, manquant de peu le titre suprême.

La fréquentation de la manade CAMBI permet à Roland DUPUY de faire la connaissance de Roland MONNIER * , alors bayle gardian aux Marquises, prend sa retraite et c’est Roland DUPUY qui le remplace, Marcel GUILLERMET est là aussi et Patrick ALARCON est le gardianoun de la manade.

DE 1975 à 1983, Roland DUPUY restera aux Marquises avec des coupures, plus ou moins longues, dues à de nombreux accidents : qu’il est vain de rappeler.
Huit années qui débutent par un bon acquis ,avec la super royale, menée jusque là par Roland MONNIER : Gardon, Brun, Loupiot, Jupiter, Goya et Joujou.

« Goya est le plus grand taureau que j’ai connu avec Rami et Gardon.
Goya était très impressionnant en piste par son intelligence et sa façon de mener sa course : sur le pays, il était très gentil avec ses congénères.
Souvent il s’échappait sur le Petit Badon, Patrick ALARCON et moi partions le chercher et au retour il s’arrêtait à chaque porte et nous attendait
 ».

(...)

[1Yvan Audouard : homme de lettres français, né le 27 février 1914 à Saïgon (aujourd’hui Hô Chi Minh-Ville) et mort le 21 mars 2004 à Paris.
Père de l’écrivain et éditeur Antoine Audouard