Vendredi dernier, la quotidien La Provence titrait dans l’édition d’Arles : "Les anti-corrida s’inquiètent du danger pour un jeune torero de 11ans" (1). Et leur présidente de porter l’affaire devant la justice...

Des anti-corrida aux "anti- escoussure" et "anti-marque au fer" il n’y a pas loin et nous risquons de voir ceux qui s’offusquent du jeu espagnol faire rapidement l’amalgame avec nos jeux taurins et notre course camarguaise.

Pour "la bourgine" (ou taureau à la corde), jeu pourtant très prisé de nos populations, il en est allé ainsi... dès 1922. Progressivement l’attaque a fait son chemin et dans le dernier quart du siècle dernier la bourgine a été interdite.

Un journaliste (qui signe Philos-Provençal) avait pourtant pris sa défense face aux calomnies de ses premiers détracteurs dans le Torero du 2 avril 1922. Je vous livre son article in extenso ci-dessous.

"L’affaire" s’est passée à Saint-Rémy mais à cette époque le taureau à la corde courait alors dans tous les villages environnants, y compris bien sûr le mien, Eyragues (voir la photo ; un click dessus pour l’agrandir).

Bourgine à Eyragues en 1919.

Le journal "Excelsior" a publié dernièrement un article violent contre l’un de nos divertissements, le plus goûté de la population provençale : la "Bourgine". Justement émue par sa lecture, la Société Protectrice des Animaux a écrit au maire de Saint-Rémy pour l’inviter à prendre un arrêté interdisant la Bourgine.

Comment la SPA a-t-elle pu prendre au sérieux les horreurs décrites par la correspondante de l’Excelsior ? Oeuvre d’une hallucinée qui n’a vu les réjouissances féroces dont elle parle que sous l’empire d’un cauchemar affreux. Elle a vu des diables noirs et barbus forger des fers de lances, des lames de couteaux, elle a vu de vieilles sorcières piler du poivre, des jeunes enfants piler du verre, tout cela pour martyriser le malheureux taureau ! Elle a vu, mais non, le PAL qu’elle a cru voir, n’était qu’une modeste tige de bambou plus légère et plus flexible que la cravache dont les jockeys abusent dans les courses de chevaux. Et tout naturellement, après avoir cru voir les instruments du supplice elle a vu le supplice lui-même : l’empalement du taureau !!!

Provençaux, mes frères, avez-vous jamais vu dans nos fêtes votives empaler un taureau ? C’est pourtant ce que nous raconte l’Elxcelsior.

La correspondante de ce journal habite momentanément une petite maison toute ensoleillée aux pieds des Alpilles. L’aspect riant de nos collines devrait éloigner d’elle pareilles visions. Nous lui apprendrons qu’au delà de l’horizon qu’elle aperçoit de ses fenêtres, horizon bordé des fines dentelures des rochers du Lion d’Arles chanté par Mistral, il se trouve une immense plaine divinement décrite par Jean Aicard, dans laquelle paissent, tranquilles, des taureaux ayant subi plusieurs bourgines et qui attendent philosophiquement le jour où le boucher viendra les quérir.

"Provençaux, Languedociens, mes frères", après de tels propos - si vieux soient-ils - un seul mot me vient à l’esprit : "Mèfi !"