Un projet de transformation agricole de l’île de Camargue, élaboré par le Société Lyonnaise d’Etudes, vient d’être mis à l’enquête.
Avant d’entrer dans l’examen du projet lui même, il est indispensable de savoir par suite de quelles dispositions légales ce projet peut être soumis ainsi à l’appréciation des intéressés.

La plupart de nos compatriotes ont suffisamment entendu parler des nombreux projets d’amélioration de la Camargue, pour que nous n’ayons aucune prétention de leur apprendre en pareille matière rien de nouveau, ils nous sauront très probablement gré dépendant de leur rappeler les mesures dont ils sont l’objet en ce moment.
L’utilité du dessèchement des marais proprement dite n’a jamais été contestée, car ils sont, d’une manière générale, une non-valeur au point de vue de la production agricole et peuvent être un fléau pour la salubrité publique, on comprend dès lors comment cette nature de propriété a pu dès longtemps être soumise à des règles particulières et exceptionnelles.
Ces règles, que prévoient les articles 649 et 650 du Code civil, ont été établies par la loi du 16 septembre 1807 qui à posé, dans les titres I à IV inclusivement, X et XI, les principes d’après lesquels s’opère le dessèchement des marais.

L’article 1er de cette loi porte « la propriété des marais est soumise à des règles particulières. Le gouvernement ordonne les dessèchements qu’il droit utiles ou nécessaires »
Aux termes des articles 2 et 3, les dessèchements sont exécutés, soit par l’État, soit par les concessionnaires, soit enfin par les propriétaires mêmes des marais. Dans tous les cas, il doit être statué par un décret rendu par le conseil d’État (art5). La loi réserve cependant un droit absolu de préférence aux propriétaires, mais les travaux ne peuvent en pareil cas être entrepris que par le consentement unanime des intéressés.
A cette unanimité qu’exigeait l’art 4 de la loi de 1807, la loi du 21 juin 1865, qui a organisé les associations syndicales en prévoyant le dessèchement des marais à substitué la majorité prévus par son article 12, soit la majorité des intéressés représentant au moins des deux tiers de la superficie.
Or le paragraphe premier de l’article 26 de la loi du 21 juin 1865, porte qu’a défaut de la formation d’associations syndicales libres ou autorisées, la loi du 16 septembre 1807 continuera à recevoir son exécution. Le gouvernement ne peut donc prononcer la concession de dessèchement qui lui est demandée conformément a la loi de 1807, que s la majorité des intéressés refuse d’exécuter elle-même les travaux et d’en supporter les dépenses. C’est dans le but de connaître le sentiment des propriétaires de Camargue que nous sommes conviés à l’enquête.

La question posée est la suivante :
« étant donné le projet dont les pièces sont soumises à l’enquête, les propriétaires consentiront-ils à l’exécuter eux même, soit par la constitution d’une association syndicale autorisée constituée en vertu des lois de 1865 et 1868 et du décret du 9 mars 1894, soit même par une minorité d’entre eux groupés en syndicat pour l’obtention d’une concession et la poursuite de cette concession »

La réponse à cette question implique l’examen du projet en lui-même, comme ce n’est pas la première fois que des essais sont tentés pour l’amélioration de la Camargue, cette étude ne peut que gagner à l’examen rapide, mais suffisant, de ce qui avait été proposé antérieurement à cette date.
Enfin, cette étude même doit être complétée par l’examen de ce qui a été réalisé depuis quelques années par les propriétaires eux-mêmes.

L’enquête à laquelle nous assistons ne peut que reproduire les sentiments de résistance bien naturels aux propriétaires, en présence surtout de l’application de lois rigoureuses en vue d’améliorations problématiques et incertaines.
Cette étude aura peut-être aussi l’avantage de mieux faire connaître la situation et de rendre juridique et raisonnable l’opposition qui se produit.
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