Dimanche dernier, sur la fin de la course des taureaux de Rouvillain, quand les deux jeunes gardians Rebuffat et Durand sortirent du toril les tridents à la main, les vers de Frédéric Mistral, que j’ai d’ailleurs placé en tête du récit me revinrent en mémoire.

Depuis 1920, j’ai eu rarement l’occasion de voir des attentes au trident, une dizaine de fois tout au plus, autant qu’en un mois avant la guerre.
Avant 1914, il n’était pas rare de voir attendre trois taureaux dans la même après midi. Je me souviens que le pauvre gardian « Casset » attendit seul dans les arènes de St Laurent un beau cocardier de cinq ou six ans et attendit quelques moments après, un autre taureau du même acabit.

Le jeune Rebuffat que certains Nimois prenaient pour un bleu en la matière, n’en était pas a son coup d’essai.
En 1919, pour la fête de St Laurent, alors qu’il était encore gardianoun (1) chez Robert, avec le bayle Chabaud, ils attendirent par deux fois, vers le café d’Ulysse et vers le toril, un vieux roublard qui avait refusé tous les rasets.

Ce fut certainement le premier succès de Jean, qui, à ce moment-là n’était pas plus haut qu’une botte de foin et ne pesait guère plus de 40 kilos.
Rebuffat à un amour propre et un courage extraordinaires, je l’ai vu tomber des vaches de trois ou quatre ans et j’étais sur qu’il châtierait bien Lou Millat. (2)
Il est de fait qu’avec Durand, ils retournèrent deux fois le melon et le provoquèrent très bien en gardians de grande classe.