Un peu d'histoire

Dans toutes les civilisations, au retour des beaux jours, les mythes liés au renouveau cyclique de la nature sont attestés. La fécondation et l’espérance des récoltes abondantes à venir donnent lieu à des cultes célébrés depuis l’Antiquité la plus reculée.

A l’époque de la floraison des vignes, les Grecs honoraient la déesse Maïa, allégorie de la déesse nourricière et de la végétation. Selon les variantes du mythe, elle était tout à la fois, étoile de la constellation des PléIades, nymphe séduite par Zeus et qui enfanta Mercure, ou nourrice de Bacchus.

Chez les Romains, cette déesse terrestre aux appellations variées (Bona Dea, Magan Mater, Flore, Prospérine...) et attributs divers était honorée au cours de fêtes exclusivement féminines. Les hommes étaient tenus à l’écart de ces cérémonies qui pour certaines étaient secrètes et avaient un caractère initiatique. Au fil du temps, elles devinrent si licencieuses que l’Empereur Constantin au IVème siècle avant Jésus-Christ dut les interdire. Pourtant Honorius les rétablit tant elles étaient populaires.

Au Moyen-Age, le sens primitif du mythe s’amoindrit comme s’altère la mise en scène des rites. Cependant, cette fête conserve une part de réminiscence des déesses féminines liées à la fécondité. Au cours de la célébration, les plus belles jeunes filles sont couronnées de fleurs, habillées de soie, assises sur « des trônes élevés en guise de jeune déesses posées dans des niches » (Michel de Notre Dame). Elles restent sages et immobiles pendant que leurs compagnes quêtent quelques sous.
Cette fête sert aussi de prétexte pour que s’exposent aux carrefours les plus jolies filles à marier. A contrario, dans certaines bourgades, le rituel est parfois tourné en dérision. Ce ne sont plus des jeunes filles qui s’exposent mais de vieilles femmes édentées et pourvues des tares physiques les plus désagréables à regarder.

Ce rite d’élection et de représentation des jeunes filles est mentionné dans d’autres région comme à Saint Claude dans le Jura, dans les Vosges, en Dauphiné, en Normandie et même en Angleterre.

D’altérations en transformations, et jusque dans les années 1950, durant lesquelles la tradition est tombée en désuétude, c’est une petite file élue par ses camarades pour sa beauté et sa sagesse, parée de fleurs et vêtue de blanc qui sera couronnée « Belle de Mai » . Les petits sous, quêtés par ses compagnes, serviront à l’élaboration d’un goûter.
Cette tradition, restée vivace à Marseille, en a laissé des traces dans la toponymie de la ville dont un des quartiers porte encore le nom de Belle de Mai dans le 3ème arrondissement.

Offrir le Mai aux filles, arbres de mai plantés sur les places, procession des Rogations sont des variantes de la célébration du mythe.

 LA MAIO A FOURQUES

Depuis 22 ans, le groupe folklorique de Fourques a remis à l’honneur cette fête, en choisissant parmi les fillettes d’une dizaine d’années, qui n’ont pas encore pris la coiffe en cravate, celle qui représentera ses membres pendant un an.

Parents et adultes assistent à cette élection.
Le jour du couronnement de l’enfant, le groupe invite à la manifestation d’autres groupes dont la section enfantine est active.
Le jour de la Fête, la petite Maio, vêtue de blanc, attend chez elle la calèche qui viendra la chercher pour la conduire à l’église du village pour assister en présence de tous les groupes à la messe.
A la sortie, elle ouvre le passo-carriero qui va la conduire jusqu’à la place d’Argence où elle est attendue par l’ensemble des groupes et par la population qui se fait un honneur d’être présente.
Au son des galoubets et des tambourins, la petite filles traverse une haie de cerceaux fleuris.
Pétales de roses à profusion, chants et danses accompagnent son couronnement par la précédente Maio.
C’est un grand moment d’émotion pour toutes les deux (et ne parlons pas des parents !). Puis, la cérémonie revêt un caractère officiel par la présentation de la petite Maio au Maire et à son conseil municipal.
La présence de la Reine d’Arles et de ses demoiselles d’honneur, des ambassadrices du Pays d’Arles ainsi que d’un représentant du Félibrige ajoute un éclat incontestable à cette manifestation. Et l’ensemble du village reconnaît une véritable identité à cette enfant.

L’après-midi, après le repas pris en commun, chants et danses aux prés, véritable fête champêtre clôturent une journée durant laquelle la petite enfance est mise à l’honneur.

Tout au long de l’année, la Maio représentera le groupe et participera aux différentes manifestations et rendez-vous auxquels celui-ci est convié.

Ce rassemblement enfantin prend chaque année plus d’ampleur. Ainsi en 2006, pas moins de 8 groupes sont conviés par l’Escolo d’Argenço, (l’Etoile de l’Avenir d’Arles (qui fête ses 100 ans cette année), L’Escolo di Tourre de Châteaurenard, Lei Farandoulaire Sestian d’Aix en Provence, La Ribambello de Tartarin de Tarascon, La Souco Tarascounenco deTarascon, Lou Riban Esteven de Saint Etienne du Grès, Les Enfants d’Aramon, Lou Roundelet Arlaten) portant le nombre des participants costumés à près de 200 personnes.

La fête sera agrémentée d’une superbe exposition de peinture, d’une exposition de photographie sur le thème « Enfance et Tradition, l’enfant dans son costume » de Christian Peter, et d’une exposition sur l’école dans les années 1900.

Au fil des siècles, le mythe allégorique de la fécondité a subi une lente modification et une perte de son sens primitif. Rituel célébrée uniquement par les femmes puis par les jeunes filles à marier, il est devenu une fête enfantine. Mais à travers l’enfance célébrée ce jour-là et qui porte en elle les promesses du futur, une part de ce mythe reste préservée.