1/ Le plus ancien titre de propriété que l’on puisse trouver pour l’étang du Vaccarès est un acte de 1225, rédigé par Pierre de Montareno, notaire public à Arles, par lequel Hugues des Baux, vicomte de Marseille, vend au sieur Dragonnet de Mondragon, podestat de la ville d’Arles et « stipulant pour la dite ville et communauté » l’étang du Vaccarès et tous les droits qui en dépendent.
Nous aurons l’occasion de reparler au cours de cette étude de cet acte de 1225, une des chartes de la Camargue, pourrait-on dire. Mais d’ores et déjà notons que cette vente du Vaccarès est une vente complète de l’étang et de tous les droits qui y sont attachés.
Dès cette époque reculée les servitudes y sont nombreuses et l’acte les énumère comme à plaisir.

L’une de ces servitudes nous intéresse plus particulièrement.
« De plus ; dit le texte, j’affirme avoir et avoir eu jusqu’à présent par droit et par raison, le droit, pouvoir et facultés libres et absolus, sans aucun trouble ou empêchement de qui que ce soit, de préparer et approprier, afin d’ouvrir et de fermer toutes ouvertures , entrées, sorties, gorges, fuites, lones, roubines, fossés ou autres lieux qui conduisent au dit étang et depuis les fossols jusqu’à la mer Malpergue ou dans tout autres eaux qui coulent entrent et sortent de la Grande Mar (1) et se rend dans le dit étang du Vaccarès ou dans ses dépendances, ou qui en sort pour retourner à la mer ou dans tous autres lieux ; lequel droit m’appartenant ainsi qu’il est dit, je vends à vous et par vous…etc…

Plus loin encore le texte poursuit :
« De plus, j’affirme avoir le droit et le libre pouvoir de détruire quand il me plait tout obstacle qui par hasard ou pour quelque cause que ce soit, se formerait dans dits lieux et qui apporterait empêchement à l’entrée ou a la sortie des eaux, à leur cours, dans les conduits, ouvertures, entrées et sorties des eaux du dit étang et de la Grand Mer, lequel droit de retenir, ouvrir et approprier, je vends à vous et par vous à la dite communauté d’Arles. »

1225-1812
Cette vente fut stipulée au prix de 36.000 sous Raimondins,(2) ce qui correspond à 5.400 francs de valeur actuelle (3). C’était sans doute une somme considérable pour l’époque, mais il faut remarquer que cette vente stipulait aussi l’abandon par le seigneur des Baux d’une foule de droits, de franchises, de privilèges et d’immunités, distinction d’ailleurs parfaitement bien indiquée dans l’énonciation du prix, par la division de la somme en deux parts : l’une de 20.000 sous et l’autre de 16.000 sous, représentant des affectations tout à fait spéciales. La communauté d’Arles est ainsi demeurée propriétaire du Vaccarès de 1225 à 1812.

C’est en effet le 25 janvier 1812 que, en vertu de la loi du 5 Ventôse an XII et d’une décision spéciale prise à la suite de cette loi le 16 novembre 1808, que fut mis en vente aux enchères publiques l’Etang de Vaccarès. Les enchères furent ouvertes à Marseille, en l’hôtel de la préfecture, et l’adjudication en fut rapportée par Mr le général Alexandre Sextius Miollis qui le réunit à la terre du Château d’Avignon, dont il était déjà propriétaire.