156/ Les engrais tirés du règne minéral sont peu usités.
Ils ne connaissent pas encore leurs bons effets dans la Camargue.
On y ignore presque entièrement, l’art de corriger la compacité de la terre par des additions de sable, et sa légèreté par des mélanges de terre compacte.
La foule des procédés nouveaux, quoique consacrés par les principes d’un bon assolement, n’y trouve guère de partisans.

157/ Les fumiers sont fort employés
Mais, les engrais, considérés par rapport à l’idée qu’on y attache communément , sont fort usités dans l’Isle.
De nombreux troupeaux, des mules pour le labourage, des pailles, des plantes pour les litières, donnent des fumiers en abondance.
Les parcs ambulants dans lesquels, au moyen de claies, on enferme les brebis, pendant les nuits d’hiver, fournissent un engrais d’autant plus estimé qu’on a mis quelques litières sous le bétail.
Les autres fumiers sont assez généralement mêlés ensemble, et portés soit dans les jardins, soit autour des mas.

158/ Engrais particuliers pour neutraliser les sel des sansouires.
Un autre engrais, le plus nécessaire de tous, dans l’état actuel de la Camargue, ce sont les pailles ou les végétaux non fermentés, qu’on répand sur les sansouires.
A moins de renoncer aux autres engrais. On ne peut remplacer ces plantes par des pailles, qui sont indispensables à la litière des bestiaux.

Après les semailles le triangle est particulièrement employé à cet objet. On le recouvre légèrement de terre, pour qu’il reste en place malgré le vent.
Les agriculteurs envoient en foule chercher cette plante dans les marais, elle promet par sa décomposition de faire prospérer les semailles subséquentes. Mais son effet sur la récolte qui se prépare, est plus précieux et plus immédiat, il neutralise ou du moins atténue la corrasion qui existe dans les sansouires.

159/ Comment le triangle opère cette neutralisation
En effet par l’intermédiaire du triangle, le soleil ne peut frapper le sol directement, et le dessèche moins.
La terre conserve alors assez d’humidité pour saturer le muriate de soude et pour fournir à la germination du grain . Sans cette précaution, le sel, dont l’attraction par l’eau est assez connue, absorberait l’humidité que n’enlèverait pas l’atmosphère, et le blé périrait d’inanition.

160/ Le triangle est insuffisant et diminue tous les jours.
Ce moyen de corriger le vice des sansouires qui se multiplient tous les jours davantage, n’est presque plus à la disposition des propriétaires depuis l’année 1810.
Le débordement qui se manifesta à cette époque, ayant franchi ou rompu les chaussées de toutes parts, roula dans la Camargue une si grande masse d’eau quelle entraîna des terres sur son passage et les porta jusque dans les marais.
Le fond de ces marais, plus ou moins rehaussés, ne donne plus aujourd’hui les plantes accoutumées.
A moins de renoncer aux autres engrais. On ne peut remplacer ces plantes par des pailles, qui sont indispensables à la litière des bestiaux.

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