4/ La Camargue a éprouvé de nombreux changements
Tite Live nous apprend qu’elle était divisée en plusieurs îles, Pline en détermine le nombre, , en donnant au fleuve 3 embouchures, d’autres auteurs tels que Justin, Festus Aviénus assignait ainsi plusieurs bras au Rhône.
Sans nous arrêter davantage à des assertions anciennes, d’où l’on ne peut tirer aucun indice certain sur la direction des eaux, venons à des temps plus modernes et voyons ce que le sol de la Camargue offre encore à nos yeux

5/ Variation de sa limite à l’ouest
Sa limite à l’ouest s’étendait jusqu’aux salines de Pécais, avant que le petit Rhône, qui y avait son embouchure, se rapprocha des Saintes Maries jusqu’à la distance de 4 kilomètres de ce bourg. On nomme Rhône Mort le lit abandonné.
On en distingue partout les traces, qui sépare le département du Gard de celui des Bouches du Rhône, qui renferment, presque dans toute sa longueur le canal de Sylvéréal et qui paraissent, par des embranchements, avoir donné naissance au Rhône de St Roman et au Rhône de la ville, deux canaux parallèles à la côte au sur d’Eyguesmorte.

6/ Variation de sa limite à l’est
La grande branche du Rhône portait ses eaux à l’est dans l’étang du Galejon, et occupait l’emplacement qu’on appelle aujourd’hui Bras Mort. Cet ancien lit est encore très profond dans tout son cours. Il touche au Rhône actuel immédiatement en amont du mas du Grand Passon, se dirige contre celui du Radeau, et coupe le canal d’Arles à une lieue de la pointe de Lansac.
Des lettres patentes du Roi René, en date du 16 juin 1470, permirent à la ville d’Arles d’élever, près de l’embouchure du Rhône, la Tour de Balouard, pour servir de guide aux navires et de défense contre l’invasion des pirates. En 1543, cette tour existait encore. Elle fut abandonnée, lorsqu’en 1587, le fleuve changea sa route pour suivre celle à l’occident que l’on connaît sous le nom de Bras de Fer. Le Bras de Fer renferme actuellement le canal du Japon. Ce fut en 1711 que ses eaux, a la suite d’une crue, se frayèrent un passage dans le canal des Losues qu’elles occupent en ce moment .

7/ Changement dans son intérieur
Si des extrémités de la Camargue, nous passons dans son sein, nous y voyons que, dans le 13e siècle la grande branche du Rhône, par une déviation dite Brassière de la Cape, la coupait en deux grandes parties. Cette Brassière, dont les vestiges sont connus sous le nom de Rhône de St Ferréol, avait son origine à une demi lieue en aval d’Arles au trou de la Cappe. Elle passait près du mas de Bouchaud, de Beyne, de la Capellanière, longeait la grande Roubine de Montlong, cotoyait le marais de la Grand Mar au sud, suivait le domaine de Notre Dame d’Amour, de Cabassole, de Mas Neuf, de l’Ange, d’Agon, de Méjanes, d’où on pense qu’elle se perdait dans le Vaccarès.

8/ Preuve du paysage d’un bras du Rhône sous les Saintes
Mais, d’après la ligne non interrompue de marécages qu’on aperçoit à l’ouest, depuis la Grand Mar jusqu’aux Saintes, et d’après les indices qu’on y découvre d’un ancien lit qui, du nord ouest du mas de Méjannes et de l’est du mas de Carrelet, passe, en suivant les bord du Vaccarès, à l’ouest des Frignans, touche Bardouine au nord, et s’infléchit ensuite vers le sud, on ne peut pas douter que le Rhône de Saint Ferréol, n’y ait jadis établi son cours.

L’atterrissement de ce bras explique comment Notre Dame de la Mer qui, suivant la tradition, fut qualifié du nom de ville, est réduite à la condition d’un très mince village, et comment ce village est devenu mal sain, depuis qu’un fleuve vivifiant ne le délivre plus de ses marais. Il est difficile de concevoir que, dans un autre état de choses, l’homme ait pu choisir son habitation aux extrémités de la Camargue dans un site presque infertile et pestiféré.