152/ L’exploitation des domaines se fait ordinairement par des métayages ou par des fermiers[/bleu marine]
Comme le système de culture employé dans la Camargue n’est plus uniforme et qu’il dépend des vues particulières de chaque agriculteur, je l’envisagerai seulement dans ce qu’il offre de plus général.
L’exploitation des terres se fait ou par un métayer qui donne au propriétaire la moitié de tous les produits, ou un fermier à rente fixe.
La méthode routinière, de laisser reposer les terres une année, prévaut dans tous les coins de l’isle , on a trop peu d’exemples qui dérogent à cette pratique.
Les chaumes restent ainsi plus de six mois fermés, et ne reçoivent pas de l’atmosphère les influences qui amènent les productions. Il est vrai qu’ils se couvrent de menues herbes, ou margal, dont profitent les brebis et surtout les agneaux , mais outre que ces animaux en retirent fort peu de nourriture, le margal épuise les meilleurs fonds.

153/ Bêtes employées au labourage.
Les bêtes de labourage étaient autrefois les bœufs. aujourd’hui on les met rarement sous le joug. On y atèle quelques fois les chevaux, mais les mules font presque tout le travail pénible.

154/ Instruments aratoires.
Les instrument dont on se sert sont :
Le scarificateur,(1) dit « arayre », le coûtre(2) et la grande charrue à roues. Le scarificateur est traîné par 2 bêtes, le second par quatre.
Enfin, on applique six ou huit bêtes à la charrue.
L’oeuvre de cette dernière est est comptée pour 4 labours, celle du Coûtre pour seux, et celle du scarificateur pour un seul.

155/ Epoque et nombre de labours.
La culture des champs que l’on veut ensemencer, commence ordinairement en janvier. Si le temps est favorable et l’humus profond, on ouvre la terre par deux sillons croisés de scarificateur, ou par un seul soit de coûtre soit de charrue, suivant qu’il plaît à chacun.
Ces deux derniers instruments sont les outils en usage, quand règnent les gelées, et le scarificateur qui dans ce cas pourrait à peine marquer le sol de raies, est seul admis dans les terres légères ou sansouireuses, parce qu’un plus grand soc enfouirait l’humus et, amenant le sable ou le sel inférieur, rendrait ces terres stériles. Les froids et les pluies de l’hiver disposent ainsi les champs remués, à recevoir les labours subséquents.

C’est en avril ou en mai qu’on les reprend avec vigueur. Les herbes naissent alors en abondance. Leur germination épuiserait les sucs destinés aux plantes céréales. Une trace de coûtre les attaque jusque dans leurs racines, et conserve ces sucs précieux .
Une autre trace de coûtre s’effectue, malgré les chaleurs, au mois d’août, temps ou les sansouires se sont multipliées. Son objet n’est pas seulement d’ameublir la terre, et de détruire les vivaces chiendentés (3) , mais de replacer au fond de l’humus le sel létifère (4) qui en était sorti, et qui ne peut remonter que l’été suivant.
Aussitôt que le mois d’octobre arrive, on confie les grains aux guérêts.(5) Ces derniers sont préparés par une raie de scarificateur, qui, par une autre trace, recouvre enfin les semences. Il en résulte que celles-ci ne sont jamais répandues, qu’après que la terre a reçu six à huit labours. C’est le fourcat ou scarificateur traîné par une seule bête, qui donne assez habituellement le dernier sillon.
Si, après son passage, les diverses parties du sol ne sont point assez divisées, on emploie la herse à deux rangs de couteaux placés en échiquier. Plus souvent on se sert de rouleau prismatique à six ou huit pans de deux mètres de longueur sur trente centimètres de diamètre, auquel on adapte par fois, sur les faces,des rangs de pointes alternatives.