Ces "théâtres" ont été construits par et pour les gens d’Aigues-Mortes. Ils leur permettent d’assister au courses de bioù avec leurs amis et invités. On se souvient d’une Ana Barthelot, n’hésitant pas à passer la nuit entière aux pieds des remparts afin de réserver un emplacement de choix pour son théâtre familial.

Aujourd’hui encore, une grande fébrilité règne autour des théâtres. Chaque année, le lundi précédant la fête, un tirage au sort répartit les théâtres selon les emplacements disponibles. Cette délicate opération se déroule dans la salle du Régent à Aigues-Mortes. Inutile d’insister sur la tension qui plane alors, surtout quand on sait qu’il existe plus de théâtres (une centaine) que d’emplacements. Cette première étape franchie, les coups de marteau dans le plan annoncent le début de la fête.

les felés

Arrêtez-vous chez Assunta ou au bar Le Perroquet, le temps d’un ou deux pastis, et profitez-en pour blaguer avec les Aigues-mortais : tous vous assureront que leur plan a fait la gloire d’Aigues-Mortes.

Les royales de Raynaud, Baroncelli et autres Granon reviennent en mémoire "même que Granon, on l’appelait le roi d’Aigues-Mortes ! Et les raseteurs ! Giniès, Simian, Arnaud, les frères Douleau, Fidani, Falomir, San-Juan, et bien d’autres encore... "

Ce prestige, Gilbert Chareyre tente de le perpétuer, aidé par l’ancien raseteur Michel Leblanc et Jeannot Planelle. "Notre désir est de maintenir les traditions authentiques et non de les travestir. D’ailleurs, nous sommes fiers du retour de la royale de Jean Lafont associée au Trophée Souvenir Robert Marchand qui se déroule dans le plan le jeudi de la fête. Nous projetons aussi de rétablir la traditionnelle royale de vaches du mardi, d’autant que ce genre de course attire de plus en plus d’afeciouna ".

Maintenir les traditions, tout est dit. Et n’oublions pas les déjeuners au pré ! Certes la jeunesse ne fait plus "un imperiau" : ce travail du dimanche matin destiné à gagner de quoi offrir l’apéritif aux filles pendant la fête.

Les chemises bariolées des bandes, les Fins-diseurs ou les Félés n’existent plus, les orchestres "Aimable" de Beaucaire ou Picaud ont été remplacés par la "peña d’Aigues-Mortes", la célèbre "gase" ou "engasado" (les taureaux traversaient à la nage le canal) a disparu. C’est vrai, les "gisclets" ont été remplacé par les pistolets à eau mais, l’abrivado et la bandido sont encore et toujours les grands moments de la fête. On retrouve cette même effervescence autour du taureau roi, lors des échappées depuis la porte Saint-Antoine en passant par le boulevard Gambetta et enfin la porte de la Marine....

Seule ombre au tableau, la menace d’interdiction qui pèse sur ces manifestations taurines. A ce sujet, Gilbert Chareyre rappelle à nouveau qu’il faudrait revenir "à la sagesse de nos traditions, que le manadier "spécialisé" dans ces activités choisissent mieux et moins de cavaliers ". Nul doute qu’il reste bien du chemin à parcourir pour sauvegarder nos traditions dans leur dignité, mais à Aigues-Mortes, on est incontestablement sur la bonne voie, celle de l’authenticité et de la responsabilité.

Comme le soulignait déjà à l’époque Granon, « pour que les générations futures gardent la Fé, celle qui est toujours ancrée au tréfonds du cœur des aigues-mortais ".