Le samedi soir, il se rend aux arènes de sa ville ou dans les villages pour raseter « en s’amusant » les taureaux et vaches emboulés.
Jacques Antoine, Sicard et Aubaterre le voient et lui disent : « Petit, tu devrais venir avec nous. »
C’est ainsi que débute sa carrière dans les ronds de charrettes.

Il s’habille en blanc en 1958, à Saint-Césaire. Après l’armée, il rasete jusqu’en 1969. Son style de gaucher plaît au public.
Il fait briller les taureaux.

Un grave accident de voiture le prive d’un œil et l’arrête un moment. Il reprend pour la fête d’Aigues-Vives, avec Patrick Castro et fait trois rubans.
A Sommières, super royale de Jean Lafont avec César, Ruas, Marchand, Geneste, puis une blessure par Gemeni de Laurent à Remoulins, et, après une dizaine de courses, il arrête de raseter.

L. G : Quels sont les taureaux qui vous ont le plus marqué ?
M. R : Mailhan, Laurent, Lafont avaient alors une super royale.
Chez Lafont j’ai aimé Mario, Gobelet et Montago. André Soler m’a aidé à raseter Lebrau en me disant : « Ne t’en va pas de la tête ! Rentre au contraire. »
Il y a eu Benjamin de Blatière, Dur aussi et Bosco qui m’a blessé.
Chez Laurent, Ramoneur, Tigre puis Fafet et Loustic.
Chez Mailhan : Milhaudois et Rami.
Chez Fanfonne, son taureau préféré, Galapian, qui était formidable à gauche.

Il y en a tant eu !
Je craignais Bosco car dès que je faisais un raset, il me sautait après.
A Mouriès, le taureau a laissé le droitier au milieu de la piste et s’il n’y avait pas eu Robert Marchand pour le quite.... ! Il m’a sauvé.
Une autre fois à Saint-Gilles pour le Gland d’Or, sur Fourmigo de Ricard, très dur à gauche, j’ai eu la moitié du gland dans le crochet, mais je n’avais plus de pantalon ni de slip !

L. G : Vos relations avec les autres raseteurs ?
M. R : J’ai eu une amitié durable avec César. On « marchait ensemble », et
quand l’un était blessé, on partageait la journée avec lui. Quand on prenait un droitier, comme Norbert Geneste, on partageait à trois. On « a eu marché » à quatre : deux droitiers, deux gauchers.

L. G : Vous allez aux courses, que pensez-vous de la course actuelle ?
M. R C’est dur de comparer avec les taureaux d’avant. Ils se gardaient plus et n’étaient pas rasetés de la même façon.

Nous, on partait à 3 ou 4 mètres du taureau et le tourneur ne se mettait pas devant.
De nos jours, le raset n’est pas le même, car le taureau ne voit pas le raseteur partir. C’est le taureau qui rasete l’homme et pas l’homme qui rasete le taureau.
Il faut parfois quinze rasets pour couper une cocarde.

Les taureaux ont la fatigue en plus, car les hommes sont plus sportifs que nous ne l’étions. Il n’y a que Poujol qui rasete à peu près comme nous avant, ou Khaled qui part, va à la tête et tire le taureau pour pouvoir mettre la main. I
l fait le raset correct.
Les autres attendent que le taureau soit sur eux, ils lui « rentrent dedans » puis vont sauter.
Major de Lafont qui se tenait le cul aux planches, les hommes ne voulaient plus le raseter, parce qu’il fallait rentrer dans son terrain pour aller le chercher.
Vincent de Ribaud qui aurait mérité d’être Biòu d’Or, ils n’en ont plus voulu.

Ce sont les raseteurs qui font les taureaux.
Vous savez, le taureau qui fait des coups de barrière, ça ne veut pas dire qu’il soit bon !
Pour moi, le cocardier parfait c’est celui qui vient bien, qui fait le coup de barrière, qui sait se garder pour se faire craindre, qui ne saute pas, sauf s’il est trop « quiché ».

L. G : Et les arènes ?
M. R : Les aménagements ont privilégié les hommes et pas assez les taureaux.
Pour moi, Beaucaire est la piste la plus dure pour les taureaux, ils n’ont pas un endroit pour se reposer.
Par contre, l’aménagement des vestiaires et des infirmeries c’est très bien.
Il n’y avait pas tout cela pour nous, pas de docteur, pas d’ambulance !
Le pauvre Canto est parti dans le corbillard qui servait d’ambulance !

L. G : Que pensez-vous des Trophées, puis de la limitation des raseteurs ?
M. R : Les trophées, ce n’est pas bénéfique pour le taureau ni le public, ça fait trop « la bagarre », ça fait mal raseter.
Il y a un peu trop de trophées partout.
La limitation, j’ai toujours été contre, car le petit raseteur qui a le courage d’aller dans une piste pourra prouver ce qu’il vaut et apprendre avec les autres.

L. G : Avec les hommes entraînés d’aujourd’hui, serait-ce possible ?
M. R : Les taureaux font le tri.
En 1965, nous étions 42 en piste à la Cocarde d’Or !
Un taureau qui voit partir deux ou trois hommes en même temps, ça le rend plus vivace.

L. G : Que pensez-vous du Championnat de France mis en place par la FFCC ?
M. R : Moi, j’aurais mis plutôt championnat régional ou méditerranéen, car il ne se passe que chez nous.

L.G : Vos souhaits pour améliorer la Course Camarguaise ?
M.R : Il faudrait modifier les pistes, mettre quelques angles pour les taureaux, peut-être ajouter des hommes dans certaines grandes pistes (comme Nîmes).
Peut-être que des sanctions soient prises par rapport à ceux qui gâchent la course d’un taureau. Pourquoi pas des cartons jaunes ou rouges comme au foot ?
Un avertissement pour mauvaise conduite en piste, puis au second il ne doit plus raseter, et pareil s’il a un carton rouge d’entrée. La commission de discipline jugera après en fonction du règlement.
Mais il faut aussi que les manadiers le respectent, ce règlement ! »

Depuis 14 années, Maurice Rinaldi est trésorier du Club des Anciens Raseteurs qui rassemble tous les anciens.
Lors du gâteau des rois offert, ceux-ci se retrouvent avec plaisir. A la ferrade du premier samedi de juin et lors du repas de fin d’année, ils honorent deux anciens raseteurs. Maurice reste toujours dans la grande famille de la Bouvine.

Photos et propos recueillis par L GROS
— La Fe di Biòu n° 76 - octobre 2003 —

UN PALMARÈS IMPRESSIONNANT

-* 1962 :
-- 1er au Trophée des Raseteurs,
-- 1er Trophée Cocarde Ricard,
-- 1er au Trophée de l’Avenir.
-* 1963 :
-- 4ème au Trophée des As
-* 1964 :
-- 4ème du Trophée des As,
-- 2ème du Gland d’Or
-* 1965 :
-- 1er Trophée des As,
-- 1er Cocarde Souvenir F. Canto,
-- 1er Palme d’Or,
-- 1er Muguet d’Or de Beaucaire,
-- 1er Crochet d’Or à Châteaurenard,
-- 2ème Coupe Jacques Giraud de Mouriès,
-- 1er Raisin d’Or à Jonquières,
-- 1er Trophée du Raset d’Or à Beaucaire,
-- 3ème Cocarde d’Or en Arles.
-* 1966 :
-- 2ème Trophée des As,
-- 1er Gland d’Or à Châteaurenard,
-- 1er Marguerite d’Or,
-- 2ème Palme d’Or,
-- 1er au Gland d’Or à St Gilles,
-- 1er Coupe de la Bière à Barbentane,
-* 1967 :
-- 1er du Trophée des Maraîchers
-- 2ème Trophée des As derrière Norbert Geneste,
-- 1er Palme d’Or,
-- 1er Marguerite d’Or
-* 1968 :
-- 1er Trophée des As,
-- 1er Palme d’Or
-- 1er Marguerite d’Or
-* 1969 :
-- 2ème Trophée des As,
-- 2ème Palme d’Or