Projet pour le dessèchement de la Camargue

50/ Les dessèchements des marais et étangs étant soumis aux lois du nivellement, méritent d’autant plus d’attention, que les terrains submergés par le défaut d’écoulement des eaux, deviennent non seulement inutiles, mais même dangereux par les miasmes qui naissent et s’échappent de la putréfaction et de la décomposition continuelle des végétaux et d’animaux qui meurent dans leur sein ; c’est ainsi que se répandent au loin les germes des maladies ; ces causes n’exigent-elles pas qu’on s’occupe des moyens de rendre à la culture des terrains immenses qui sont dans ce département.
Ainsi pour compléter les améliorations dont cette contrée est susceptible, nous proposerons encore de construire un canal pour servir à l’irrigation des terres cultivées et au dessèchement de toutes les parties basses et marécageuses de la Camargue. Ce canal pourrait être dérivé du petit Rhône au dessous de Fourques, il serait divisé en plusieurs branches, et lorsque les eaux seraient bourbeuses, on les conduirait dans les marais du Pont de Rousty, du Cellier et du Vaccarès.
En dirigeant les dépôts avec attention et avec méthode, on parviendrait en peu de temps à dessécher toute cette ile. Nous voyons des communes où les habitants savent se procurer des atterrissements de plus de quatre décimètres d’épaisseur dans une année, et par la manière dont ils conduisent les eaux troubles, ils créent en peu de temps des champs fertiles et très étendus dans les endroits où il n’y avait que gravier et marais.

51/ Le terrain ainsi desséché et engraissé par le limon du Rhône, deviendra de la plus grande fertilité ; on pourra y faire de vastes prairies, augmenter les haras, dont les chevaux sont les plus agiles à la course, et enfin ce sera un grenier d’abondance ; à en juger par les parties qui sont cultivées et dont les produits sont immenses.

52/ Un des principaux avantages de ces dessèchements, c’est de procurer à cette contrée la salubrité de l’air, et de la délivrer des eaux croupissantes qui l’infectent et la rendre inhabitable pendant une partie de l’année, y causent des fièvres intermittentes, dont les effets pernicieux se font ressentir fort au loin.

53/ La nouvelle direction que nous proposons de donner au Rhône, portera, ainsi que nous l’avons observé (voir au 44), les dépôts et atterrissements dans un grand golfe, où ils se perdrons sans pouvoir nuire aux ports de Marseille Bouc, Sette et Agde ; le navigation de cette nouvelle dérivation ne sera pas plus facile que celle du canal des Launes ; à cause de la difficulté à contourner le cap formé par le canal du Bras de Fer, et par tous les obstacles que ce fleuve n’a cessé d’opposer à toutes ses embouchures, et dont nous avons déjà parlé dans les paragraphes 5,21,23,24,25 et 31 ; pour y suppléer, nous proposons de construire un canal de navigation qui traversera la Crau, depuis l’étang de Saint Chamas, ou dit mer de Berre, jusqu’au Rhône, à Arles.