21/Mouvements du sol de l’Isle.
Le sol de la Camargue a dù, par sa formation même, acquérir une pente dans le sens du courant. Cette pente se trouve être, par le fait, de 4,50m depuis le sol à la pointe de l’isle jusqu’au niveau de la basse mer. Elle est de 1,785m, depuis le niveau des basse eaux du Rhône, sous le pont d’Arles jusqu’au niveau de la basse mer aux embouchures du Rhône.

Les dépôts des grandes eaux, quand le Rhône n’était pas contenu par des digues, ou quand il les a franchies, ont dù principalement exhausser le sol qui avoisine les branches du fleuve, et d’autant plus qu’elles l’ont baigné plus longtemps.
Les nivellements confirment cet exhaussement, et prouvent que le profil transversal de la Camargue est composé de deux pentes variables qui, allant l’une du grand Rhône vers le petit, l’autre de celui-ci vers le grand Rhône, se rencontrent dans l’intérieur du delta.
C’est sur la ligne ondulée qui résulte de l’intersection de ces deux pentes ou revers, comme à l’endroit le plus bas du terrain, que doivent naturellement se réunir les eaux qui tombent dans l’isle pour y séjourner en marais, étangs, ou s’écouler à la mer, suivant les mouvements de cette ligne d’intersection. Aussi, voit-on les rives tant du petit que du grand Rhône, et celles des bras attéris qui ont roulé longtemps un certain volume d’eau, couvertes près qu’en tout lieux de moissons et de prairies. Les pâturages et les terres vaines viennent ensuite et les marais, les étangs, occupent l’intérieur de l’isle, en descendant vers la mer.

22/ Causes de la stabilité de certaines parties de l’isle.
Cet ordre de production et de stérilité, dans le sol de la Camargue, est général , s’il paraît être quelques fois interrompu, par des terrains arides situés au voisinage du fleuve, ce ne peut être que par des causes accidentelles.
Tantôt l’aridité provient de la grande abondance de sel marin déposé par la mer dans sa retraite. Tantôt elle est due au transport, sur les terres, des sables dont se chargent les grands vents.
Ce dernier effet se manifeste journellement auprès du petit Rhône, ce bras du grand fleuve, quand les eaux sont basses, laisse à découvert une foule d’islots sablonneux qui, balayés par les tempêtes, répandent au loin leurs débris infertiles, et recouvrent l’humus au préjudice de l’agriculture.

Quand aux lieux imprégnés de sel marin , ils se montrent partout où les dépôts du Rhône ne sont pas considérables, et surtout là ou les terres ont peu de vente, et ne doivent qu’à l’évaporation de ne pas être de vastes marais. Nous verrons plus tard l’explication de se singulier phénomène qui menace de frapper l’isle de stérilité.