Le 5 septembre 1850, le conseil général du Gard vote « à la presque unanimité, un vœu favorable à la suppression des courses 4

Le 11 octobre 1850, une lettre du préfet du Gard à son collègue de l’Hérault 3 annexée à ce mémoire, fait le point de la situation.
D’emblée le ton est donné, les courses de taureau exercent « une influence sur les mœurs publiques ».
L’on y apprend également que « le déploiement de la force publique a été souvent nécessaire pour contenir l’irrésistible entraînement de la population vers ces jeux »

Mais le souci principal est d’unifier les « mesures répressives contre les courses » .
Comment expliquer en effet, ajoute le préfet, que les courses permises dans l’Hérault fussent prohibées dans le Gard ?
Rien ne serait plus propre à égarer les esprits et compromettre le principe d’autorité que d’établir pour les communes limitrophes, des règles contradictoires ».
Une telle attitude, on le comprend, ne pouvait que donner prétexte au mécontentement populaire (toute correspondance entre les préfets du Gard et de l’Hérault, comme celle du ministère de l’intérieur à ces deux préfets, témoignent de la volonté de ne pas créer de précédent)

Ce souci, nous le retrouvons à toutes les époques et même de nos jours.
Les courses de taureaux touchent quatre départements, essentiellement le Gard, puis l’Hérault, ensuite le Vaucluse et les Bouches du Rhône.
Or il n’existe et n’a jamais existé, aucune législation en matière de spectacle taurin.

Dans ces quatre départements, chaque préfecture peut prendre les mesures qui lui paraisse les meilleures.
S’il y eut très souvent des conseils, des suggestions, des recommandations de la part du pouvoir central, à aucun moment, il n’y eut une réglementation nationale spécifique aux spectacles taurins.

À ceci, s’ajoute une difficulté supplémentaire : la plupart de ces villages ne sont distants que de quelques kilomètres, alors qu’ils n’appartiennent pas au même département, ni à la même région administrative.
Comment interdire quelque chose à Saint Laurent d’Aigouze et à Aimargues et l’autoriser à Marsillargues ou à Lunel ?

La seule loi sur laquelle il est possible à l’autorité préfectorale de s’appuyer est la loi Grammont [1]
Lorsque le préfet du Gard écrit cette lettre, la dite loi vient d’être votée quelques mois auparavant et il ne manque pas de signaler à son collègue de l’Hérault, qu’elle rend leur tâche plus pressante encore.

[1 loi Grammont : Jacques Delmas de Grammont, général et député, est célèbre pour avoir fait voter par l’Assemblée nationale législative, le 2 juillet 1850, une loi dite loi Grammont :
« Seront punis d’une amende de cinq à quinze francs, et pourront l’être d’un à cinq jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques. »