Le second témoignage que nous voudrions citer sur cette époque est d’Alexandre Dumas, tiré de ses « Impressions de voyage » dans le midi de la France.

Œuvre écrite en 1841, où il nous conte une ferrade qui se déroule dans les arènes de Nîmes [1].

— "En approchant de Nîmes, à notre retour d’Aigues Mortes, nous fumes frappés d’un étrange spectacle.
La ville semblait une immense ruche, autour des portes de laquelle se pressaient des milliers d’abeilles, c’étaient des cris, des rumeurs et des bourdonnements, comme on en entend dans les émeutes populaires.

Au milieu de tout ce fracas on distinguait des roulements de tambour et les éclats de fusées.
Nous doublâmes le pas pour ne rien perdre de ces préparatifs et, en franchissant la porte, nous tombâmes du premier bond au milieu de la procession qui faisait l’annonce.
Elle se composait de tambours et de hautbois, derrière lesquels marchait un gamin de 12 ou 15 ans, sans souliers, vêtu d’une chemise et d’un simple pantalon de cotonnade, soutenu par une seule bretelle et portant une espèce de perche au haut de laquelle on lisait sur une planche clouée en travers GRANDE FERRADE
"

Derrière cette espèce de porte-enseigne, venait, bras dessus bras dessous, la moitié des ouvriers et des grisettes de la ville, l’autre moitié était aux fenêtres.
Nous nous mîmes à la suite de cette procession, et nous arrivâmes à l’hôtel [2].

Vers une heure du matin, il est réveillé par des « conducteurs à cheval » qui amènent les taureaux pour la ferrade du lendemain ( les taureaux arrivaient la nuit le plus souvent, de peur qu’ils ne commettent des dégâts).
Il est frappé par le nombre des spectateurs « quand on fut bien convaincu que toute la ville était réunie dans les arènes, on ferma les portes  »

Il nous décrit ensuite la ferrade, où les gardians a cheval, avec le trident, essaient de renverser le taureau, marqué aussitôt par un boucher, devant une foule nombreuse et animée.

— "Pourtant, dans la semaine, Nîmes est silencieuse et solitaire.
A peine en avançant la table à la fenêtre voit-on trois ou quatre personnes dans toute l’étendue de la rue.
C’est que la population ouvrière, composée presque entièrement de tisseurs de soie et de coton, vit dans ces ateliers ou dans ces caves et ne sort de sa demeure souterraine, où la consume son travail ténébreux, que les jours d’émeute ou de fête.
"

[1Alexandre Dumas "Impressions de voyage" tome2, "le midi de la France"

[2Alexandre Dumas