Sa carrière s’est terminée brutalement et prématurément, en 1957, à 46 ans. Cependant, on ne peut pas dire qu’elle a été brève.
Dès l’âge de onze ans, il gardait les taureaux de Marcel Gabriel, pendant le peu de temps où Gabriel est resté manadier.
Ensuite, il est entré au service de Granon jusqu’au service militaire ; ensuite, chez Robert ; puis chez Fonfonne, avant d’entrer, après un bref séjour dans les Bouches-du-Rhône, chez Jean Lafont, grâce à Bernard de Montaud-Manse.

C’était l’époque où les taureaux se gardaient à « bâton planté », une règle qu’il ne s’agissait pas de transgresser, car Granon surveillait, même de loin, son monde et ne s’en laissait pas conter.
Une époque que la vie des gardians à ce moment-là.

La vie familiale même du gardian se réglait sur le cycle des pâturages, du Cailar à Fiélouse à l’époque Guillerme ; de Sainte-Anne à la Tour d’Anglas et au mazet de Jean Martin, de 1946 à 1957, quand il était baile de Lafont.
L’hiver on était au calme, à Ste-Anne, même si ça n’était pas pour autant le repos avec les barrages à réparer, les veaux à soigner.

Au moment des ferrades c’était la période difficile qui commençait, malgré la présence d’amateurs dévoués et compétents, Jean Martin, Georges Brun, les
San Juan Francis, Francine, Arthur et les autres.
Pour la femme du gardian c’était aussi difficile, ces modernes centaures étaient dotés d’un solide appétit et la table du mas n’était jamais assez grande.

Après, il fallait s’installer à la Tour d’Anglas pour éviter les grands trajets à cheval, pour finir au Cailar pendant la période de « bourre ».
"Ses" taureaux, il les aimait tous, sans préférence aucune, même s’ils ne le lui rendaient pas forcément.
Le grand Cosaque lui a même infligé plusieurs blessures : une au bras, dans l’écurie, et une autre à Aigues-Mortes, où il lui a fait sauter plusieurs dents.

Le superbe frontal de Facteur, mort en 1956, décore la salle à manger.
Peut-être était-ce lui, au fond, le favori ?
Les chevaux, il les dressait lui-même avec l’aide de Jean Lafont.
Ensuite, son fils Loulou l’aidait mais, malheureusement, le destin n’a pas voulu la suite de cette collaboration.
Ses rapports avec Jean Lafont ont toujours été bons, le caractère calme de l’un modérant le tempérament vif de l’autre. Leurs relations ont été marquées par le signe de la confiance que le « pelot » accorde à quelqu’un qui était digne.
C’était parfois, même de la connivence, en particulier, à l’époque où Jean Lafont étant déjà propriétaire de la manade, Fernand Granon, souhaitait encore être au courant des affaires. Il fallait bien se mettre à deux pour aller affronter « l’espoussage » quand l’initiative ne correspondait pas à ses vœux.
Quel plaisir de feuilleter les carnets où Marceau notait : les naissances, les ascendants, la date de la première course de toutes les bêtes, dont il ne reste maintenant que le nom !

Ensuite, nous avons fouillé ensemble dans la masse de photos qu’Alice et les siens conservent pieusement. Beaucoup sont liées aux événements taurins qui ont jalonné l’histoire de la manade. Alice les commente pour nous, simplement.
Si nous nous étonnons de ne pas le voir sur les images glorieuses, la réponse est nette : les soirs de fête, on voyait arriver des gens qu’on ne voyait jamais mais, lui, avait à s’occuper des taureaux vedettes, mais aussi des autres et les journées étaient longues.

Discret, modeste, mais gardian prestigieux, tel était Marceau, Nous avons eu infiniment de plaisir à lui rendre ce nouvel hommage.