Le Fort de Peccais est situé au sud-est d’Aigues-Mortes, entre joncs et bruyères, à l’intersection du canal du Bourgidou et celui qui mène à Sylvéréal.

Son nom vient de ’’Peccatius’’, nom de l’ingénieur romain inventeur des premières techniques d’exploitation du sel.

PECCAIS : Un fort plein de Salin

PECCAIS, à quelques kilomètres d’Aigues-Mortes, c’est l’empire du sel. Déjà en 1461 ce lieu était désigné sous le vocable : " Salinœ de Peccaysio " ! C’est tout dire. Une chapelle, aujourd’hui disparue y avait été édifiée et était desservie par un père Capucin d’Aigues-Mortes !

Mais pourquoi un fort fut-il édifié ?
Tout simplement pour surveiller les Salins où sévissait une contrebande effrénée.

Les Salines de Peccais fournissaient à l’Etat le septième de l’impôt sur le sel qui était, on le sait, une des grandes ressources de l’ancien régime. Les contrebandiers étaient condamnés aux galères et parfois même, lorsqu’ils étaient pris les armes à la main, à la peine de mort !

Le fort actuel date du XVIIè siècle mais il fut précédé par un premier bâtiment qui fut pris et repris durant les guerres de religion par protestants et catholiques. En 1598, le fort fut au nombre des places de sûreté laissées aux protestants avec un effectif de dix-huit hommes. L’un des gouverneurs protestant en fut en 1627, Jacques Gautier qui fut Amiral du Levant et mourut lors du siège de l’Ile de Ré.
Plus tard, Charles de Saint-Simon, l’oncle du célèbre mémorialiste fut à son tour responsable du fort et il y resta de 1634 à1644.

En 1636, le Roi avait ordonné la levée d’un impôt sur les contribuables du Languedoc pour un montant de 36 000 livres et qui devait être utilisé pour les réparations nécessaires au fort. Malgré l’opposition des Etats du Languedoc, on fit au XVIIIe siècle d’importants travaux mais en 1775 la garnison était composée d’invalides et au dix neuvième siècle, l’ouvrage fut déclassé !

Venons-en à la construction elle-même. Son plan était un quadrilatère flanqué aux quatre angles d’un bastion. Un large fossé complétait la défense et il était doublé d’un contrefossé.

Actuellement on peut voir à la pointe d’un bastion, un cul de lampe mouluré servant à supporter une échauguette. Proue d’un navire de pierres à jamais englué dans le marais.

Les dimensions de Peccais étaient respectables (plus de cents mètres entre les pointes de deux bastions). Il fut certainement construit sur pilotis, les pierres furent amenées de fort loin par barges ; il se peut que les carrières de Beaucaire aient fourni la matière première.

A l’intérieur du quadrilatère s’élevaient des bâtiments autour d’une cour centrale, des hangars, magasins, le logement de l’officier commandant la place des casernes. Tout cela servi de carrière au siècle dernier pour les habitants des environs et rien ne subsiste de cet aménagement intérieur.

Ce qui reste de Peccais mérite d’être conservé et mis en valeur [1] car il y a là le témoignage d’une architecture militaire qui, Sylveréal ayant disparu, est unique dans notre Camargue.
(...)
Peccais, un de ces lieux qui ont participé à notre histoire régionale vaut bien une visite.

Article écrit par JC. DUFAU.

Source consultée pour cet article :
" Monuments méconnus Provence" (Henri Paul Eydoux)

  • Le Fort de Peccais, chapitre 35 .
    Librairie académique Perrin 1978.

Voici ce qu’en dit le Ministère de la Culture*  :

  • Historique : Fort construit sous Louis XIII pour assurer le monopole royal sur le sel alors que la ville d’ Aigues-Mortes est placé de sûreté protestante ; 1838 autorisation à Maxime Baragnon et Cie (Cie des salins de Peccais) , pour une fabrique de soude ; arrêt probable lors de la mise en activité de la soudière de l’ usine Pechiney à Salindres vers 1858 ; 1942 casemates dans 3 des bastions du fort et plusieurs blockhaus autour près du canal, actuellement à l’ état de ruines ; un bâtiment assez important construit contre le flan sud-est a été détruit il y a quelques années
  • Description 2 fours industriels à soude dans l’ extrémité du bastion sud, cuves trapézoïdales en béton à gros graviers enduites de tuileau [2] avec coupole un peu irrégulière en pierres de taille calcaires probablement récupérées du fort ; casemates en béton rajoutées dans les autres bastions.

Plaque explicative :

[1Hélàs, actuellement le visiteur ne voit aucune trace de conservation ou de mise en valeur.
Envahies par la végétation ces ruines sont vouées à disparaître sauf... (NdR)

[2Le tuileau est formé de tuiles ou de briques en terre cuite broyées finement.
Il entre dans la composition du mortier antique romain dit mortier au tuileau. Il forme une solution de réemploi pour ces matériaux.

Portfolio