Gardian, quand sur la plage une âpre chevauchée
Te jette éperdument l’âme comme arrachée
Du monde, les taureaux s’abattent dans la mer,
Et ton cheval hennit, bonheur vibrant et fier
Tout entier rafraîchi par la vaste naissance
Du vent qui comble aussi d’incomparable aisance
La crinière exaltée et souple dans le noir.
Toit, dominant de loin le bétail fauve et noir
Qui charge, par moment, ombrageux et farouche,
Les vagues, tu conquiers le soleil qui se couche
Avec tes longs regards nuancés et lointains
Gratifiant de fleurs secrètes des les destins.
Tu songes, ô gardian : « j’affermis l’équilibre
« Du corps et de l’esprit quand je chevauche libre
« En un temps où l’espoir demeure consterné
« Libre sur le terroir palustre où je suis né !
« Mille flamands là-bas hâtent leurs long vol roses
« Qui dans les joncs obscurs tombent comme des roses,
« Et la première étoile enhardis le courlis
« (Cou-re-li ! cou-re-li !)qui jaillis comme un lis
« Séraphique jusqu’aux renaissances Plëiades
« Quelque faune échappé, par miracle, aux noyades
« Des siècles, dans les rais de lune efflorescent
« Chercherait vainement des jeux éblouissants
« De nymphes ; il mourra bientôt comme un vestige
« Insensé n’ayant plus ni force, ni prestige
« Certes il s’enlisera dans quels obscurs roseaux
« Dans quelle obscurité funeste à ses vieux os !
« Rassemblant, qui flottaient, dans un frisson, les rênes
« J’entends parfois en moi, j’entends que de sirènes
« Tentent de me séduire avec leurs chants impurs ;
« Mais mon cheval, sabots étincelants et sûrs,
« Déjà m’enlève avec sa prompte intelligence
« Du danger. Je n’écoute pas cette allégeance
« Mensongère, ses chants ambigus à dessein
« Au charme intime, insidieux, doux comme un sein.
« Saint-Georges exalté par sa propre bannière,
« Je souris emporté dans la haute crinière,
« A nouveau rassuré par le hennissement
« Dont tressaille une étoile heureuse au firmament ».