Le taureau

Dans la plaine sauvage aux horizons sans bornes,
Et que le Rhône enferme entre ses bras puissants,
Tu jettes aux échos tes sonores accents,
Dressant dans l’air salin le croissant de tes cornes,

Ces espaces souvent désertiques et mornes,
Leurs marais endormis et leurs pins languissants,
S’animent, quand suivi du troupeau, tu descends,
Vers la rive où le jonc se mêle aux salicornes,

Tu vois, indifférent, ton domaine ancestral
Subir les durs assauts que livre le mistral
Et parfois le courroux du fleuve autoritaire.

Mais quand le soir étend son voile sur les prés,
Vaguement inquiet de l’ombre et du mystère,
Tu mugis longuement vers les cieux empourprés !

Jehanne Ravier