Au début du XXème siècle, la multiplication des courses était déjà une évidence. Les jeux taurins et la course à la cocarde étaient de plus en plus prisés et le public de plus en plus nombreux mais lorsque les taureaux sortaient, ils ne portaient qu’une cocarde et le(s) gland(s).
Bien que les raseteurs de l’époque ne fussent pas les athlètes d’aujourd’hui, certains comme Julien Rey n’étaient pas maladroits et les taureaux rentraient tôt au toril, dépouillés...
La brièveté de leur passage posait une "revendication" (si on peut dire). Comment faire pour que le taureau reste plus longtemps en piste, pour la satisfaction du public, tout en permettant aux raseteurs de rafler quelques primes supplémentaires ?
On alla chercher de l’autre côté des Pyrénées, mère des tauromachies, une pratique bien connue : Le Jeu des cocardettes.
"En 1919, on met en pratique le jeu des cocardettes. C’est une tradition espagnole, issue de la corrida et jadis pratiquée par les pégadores. Les parches (emplâtres d’étoffe munis de poix) étaient posés sur le frontal, un peu selon la technique des banderilles, mais seulement à des taureaux faciles. En Provence et Languedoc, c’est une nouveauté et les cocardettes sont posées entre les cornes, une fois la cocarde levée.
Il y a cependant dans cet exercice quelque chose qui reste proche du raset classique et rompt cette fois-ci avec la corrida et ses passes de cape. Il prolonge aussi le temps de piste du cocardier, à une époque où l’on ne lève pas les ficelles. Le jeu des cocardettes, abandonné puis relancé, n’eut donc plus de raison d’être dès qu’il y eut de nombreux attributs à lever. Néanmoins, on peut presque dire qu’il fut comme une sorte de retour vers l’authenticité ou l’épuration. D’autre part, il signifiait assurément le désir de prolonger la prestation du taureau, de mieux juger son comportement et son amélioration au fil des minutes et, malgré ce que l’on peut en penser, il fut donc, semble-t-il, plutôt constructif pour l’afecioun."
(d’après l’ouvrage d’Alain Laborieux : "Des Siècles de Bouvine."’
"La cocardette est une petite cocarde fixée sur un carton enduit d’une fine pellicule de matière collante (poix, NdT)
Le raseteur devait la coller sur le front du taureau.
Lorsque six cocardettes étaient posées, le taureau réintégrait le toril"
(d’après l’ouvrage de J. Durand et P. Coulomb "Le rouge et le vert")
" La cocardette était, comme son nom l’indique, une toute petite cocarde, ressemblant un peu à la devise que l’on plaçait autrefois sur le garrot des taureaux-vedettes.
Derrière le carton où étaient fixés les rubans, on appliquait une mince couche de matière collante.
Il s’agissait alors, dans un raset, de « coller » sur le front du taureau cette petite cocarde, aussi près que possible de l’endroit où se trouvait précédemment le ruban rouge.
Le taureau ne sortait peut-être pas très joli de cette lutte — surtout les médiocres — car il avait assez rapidement le front tapissé de petits rubans multicolores qui ne faisaient pas un bel effet. "
Nous dit Marcel Salem dans son ouvrage : A la gloire de la Bouvine