Espelly Jacques (1-3)
Extrait de la revue "la Bouvino" N°42 de novembre 1983
Pre-introduction
Jacques Espelly est trop modeste pour le dire, mais il a réussi un exploit.
Et, pas n’importe lequel : Celui d’être parvenu à se faire un nom dans le monde de la bouvine. Dans l’ombre de son illustre patronne Fanfone Guillerme. (...)
Au moment où, grâce à Segren, pleuvent sur la manade les récompenses sur la manade, il était logique de rencontrer l’un des artisans de ce succès, Jacques Espelly.
Il a fouillé dans sa mémoire, 45 ans de collaboration avec Fanfonne, ont été évoqués. Sans oublier la comparaison avec le passé. Une comparaison qui en surprendra probablement plus d’un. Sauf ceux qui connaissent bien le bonhomme et qui savent qu’il est avant tout, un professionnel discret et efficace.
Un gardian de métier qui se sert de son expérience pour mieux avancer dans l’avenir.
Introduction
" J’ai commencé chez Mlle Fanfonne Guillierme le 8 juillet 1938.
Par hasard ; j’habitais les Saintes et les Saintois, à cette époque, menaient une vie essentiellement rustique et paysanne.
Je venais d’entrer au service de Mr et Mme Rouvilain, ancien manadiers, dans les prés de Balarin du Roure, voisin et ami de Fanfone.
J’avais 16 ans, ils m’avaient engagé pour conduire le râteau. Chez les Rouvilain, je voyais parfois Mlle Fanfonne et son gardian René Chabaud.
Quand la première coupe des prés fut terminée, j’allais regagner les Saintes, mais René Chabaud me dit " en attendant la deuxième coupe si tu venais faire le gardianou à la manade ? ».
J’avertis René Chabaud de ma totale ignorance de ce métier. Il sourit et me dit « tu apprendras »
"Quand vint la deuxième coupe, je retournai à Balarin, pour une semaine seulement. Car René Chabaud revint me chercher, comme j’avais apprécié mon séjour à la manade, et avec l’autorisation des Rouvilain, je ne me fis pas prier.
1/ En avance sur son temps.
Ainsi Jacques Espelly débute dans le difficile métier de gardian.
Par hasard et sans connaissance. Mais, il est à la bonne école Mlle Fanfonne Guillierme et René Chabaud vont lui apprendre le métier.
"Je connaissais peu Mademoiselle Fanfonne GUILLERME, aux Saintes, les habitants la traitaient d’excentrique, en fait c’était avant tout une fille très dynamique, très sportive, très agréable à fréquenter. Elle était très en avance sur son temps.
Elle montait à cheval, chose très rare en 1938. Elle menait une vie que l’on croyait réservée aux hommes, elle a, à sa manière, participé à la libération de la femme »
2/ En 45 ans de bons et loyaux services, n’y -a-t-il pas eu parfois quelques tiraillements ?
Nous avons toujours travaillé ensemble, nous avons souvent discuté des problèmes et nous nous sommes efforcés de nous adapter à l’évolution de la manade.
Mon frère est arrivé en 1944, cinq ans plus tard René Chabaud, fatigué et estimant que nous étions capables de conduire les destinées de l’élevage, se retirait, ainsi nous sommes devenus les seuls gardians de la manade qui de 1949 à 1952 fut associée avec Loustau et Vedel et qui s’est séparée en 1956 de l’association avec Grand pour devenir la manade que vous connaissez aujourd’hui : la manade Fanfonne Guillierme »
3/ En fait, Mlle Fanfonne Guillierme a-t-elle joué un rôle important dans la manade ?
« Elle a une grande connaissance de l’élevage.
Mais, l’élevage a évolué, Fanfonne avait appris à conduire les taureaux partout et à les élever d’une certaine façon.
L’an 1940 marque les premiers signes d’une sérieuse évolution. Avec Fanfonne nous l’avons faite ensemble, sur la base de ce qui est la course camarguaise actuellement. Comme tous les éleveurs nous nous sommes tournés vers les taureaux capables de faire du spectacle dans les grandes arènes.
Aujourd’hui, (2) elle nous accompagne sur la manade et nous regarde faire.
Elle monte encore à cheval (1983 NdR), un cheval calme, sage, mais très dynamique et en pleine possession de ses moyens. Elle lui demande de faire pas mal de choses, parfois, j’ai peur que le cheval se mette, par jeu, à galoper et fasse courir un danger à Fanfonne qui n’a plus ses réflexes d’antan.