Quiha à la cimo de l’aubras, Ziri, en s’aliscant lou plumage, gai de se vèire rendu, s’espoumpissié. A-n-aquest rode d’aqui ié disien li Gràndi Cabano e, chasque an, entre abourda li bèu relarg dóu Miejour, Ziri s’envoulavo pèr ana faire visito à soun grand coulègo. En bas, au pèd de l’aubre, aro, Ziri regardavo lusi un cubert de sagno que couneissié proun e, dins sa fino ausido d’estournèu, destriavo, souto vènt, un dindin de sounaio escampihado.
— Soun alin, faguè Ziri.
E gai, s’envoulè pèr ana pica à la cimo d’uno gacholo e repassa à soun aise li bèstio que, long di baisso, prenien soupado. Se bandiguè mai, se pausè sus uno autro branco, e countènt, aro, emé soun pichot iue viscard que negrejavo, en fasènt la voues menudo, sounè :
— Oh ! Bouah-Hou ! Bouah-Hou !
— Quau me souno ? diguè Bouah-Hou.
Ero un esclapas de tau, negre de-pertout e qu’adeja se fasié dins l’age. Lis ome i’avien mes "Lou Lancié" à respèt de soun banage, qu’i courso prouvençalo, mounte si cop d’arrambage e sa routino i’avien douna de renoum, si broco carnassiero fasien flòri, mai li bèstio, de soun bon noum de biòu, ié disien Bouah-Hou, pèr raport à soun bramage.
— Quau es que me souno ? demandè Bouah-Hou em’un biais menèbre, en aubourant sa testasso, vese pas res !
Mai Ziri esquihè en ramant, se ié leissè retoumba long de l’esquino e, d’aqui, en sautourlejant, se ié venguè quiha, bèn d’esprès sus la pouncho de la bano gaucho.
— Couquinot de Ziri, es tu ? faguè Bouah-Hou en estirant lou coui e en guinchant pèr espincha lou levènti.

Perché à la cime du grand arbre, heureux d’être arrivé, Ziri se prélassait en lissant son plumage. Cet endroit-là s’appelait les Grandes Cabanes et chaque année, sitôt avoir atteint les belles limites du Midi, Ziri s’envolait pour aller rendre visite à son grand ami. Ziri regardait maintenant en bas, au pied de l’arbre, luire une toiture de roseaux qu’il connaissait bien et sa fine ouïe d’étourneau distinguait sous le vent le tintement de sonnailles éparpillées.
— Ils sont là-bas, dit Ziri.
Heureux, il s’envola pour atteindre la cime d’un gros tamaris et passa tranquillement en revue les bêtes qui mangeaient le long des terres basses. Il s’élança de nouveau, se posa sur une autre branche, et enfin satisfait, son petit oeil malin noircissant, d’une voix menue, il appela :
— Oh ! Bouah-Hou ! Bouah-Hou !
— Qui m’appelle ? fit Bouah-Hou.
C’était un énorme taureau, entièrement noir et qui avançait dans l’âge. Les hommes l’avaient baptisé "Le Lancier" vue son armure aux broches criminelles qui avec ses réactions et son expérience le faisaient triompher dans les courses provençales, ce qui lui avait valu sa renommée. Mais les bêtes l’appelaient Bouah-Hou, de son vrai nom de taureau, par rapport à sa façon de mugir.
— Qui m’appelle ? demanda Bouah-Hou d’une manière brutale en relevant sa grosse tête, je ne vois personne !
Mais Ziri glissa d’un coup d’aile, se laissa tomber sur son échine et de là, en sautillant, vint se percher en le faisant exprès, sur la pointe de la corne gauche.
— C’est toi, coquin de Ziri ? fit Bouah-Hou en étirant le cou et en fermant un oeil afin de voir l’espiègle !

...

Bouah-Hou, vieux et boiteux est destiné à la boucherie mais Ziri qui a eu vent de l’intention du manadier, le sauvera à son tour plusieurs fois du carnage et le brave cocardier finira tranquillement ses vieux jours sur le pays.