Courses de cocardes, capéa, ferrades, corridas de muerte, lutte à la corne en un mot, ont une origine commune, une origine si lointaine qu’il faut la rechercher dans ces joutes pastorales aussi vieilles que la demi domestication des troupeaux sauvages par les peuples pasteurs.
Les diverses phases de ces joutes devenues peu à peu traditionnelles se sont perpétuées et progressivement enrichies dans les pays où comme jadis en Théssalie, comme aujourd’hui en Provence et en Languedoc, le goût des populations servi par les qualités combatives d’un bétail libre réalisait la création de ce sport taurin. La course libre est donc intimement liée à ce tout qui constitue la tauromachie et par son caractère traditionnel, particulièrement méridional, elle a tous les droits à notre affection. Il y a lieu d’ajouter qu’elle est aussi école d’agilité et de courage ce qui justifie le goût de ses fervents adeptes dont au Midi-Taurin nous sommes fiers d’être du nombre.

Le bétail camarguais a démontré souvent dans ce genre de courses des qualités de très réelle combativité jointe a cette puissance du jarret si particulière à la race Camargue.
Les annales des manades françaises ont conservé le souvenir de ces taureaux fameux qui avaient pour nom : « le Paré », « Le Prouvenço », « le Madur », « Le Cafetier », « Le Caveirac ».
La guerre avait porté un coup dur à nos manades, mais les efforts de certaines manades ont permis la reconstitution de troupeaux où certaines bêtes semblent devoir prendre à leur tour la renommée de leur illustres devancières. C’est ainsi que le manadier Combet-Granon du Cailar possède actuellement un lot de taureaux dont les prouesses se répètent dans toutes les arènes de notre région. Parmi ceux-ci il en est un dont l’éleveur est justement fier et qui a retenu de tous ceux qui l’ont vu courir. C’est « le Sanglier », beau taureau noir, à l’encolure puissante, aux attaches fines, au rapide jarret ? Né en 1916, produit d’un taureau fameux de l’époque le « Belcita » il parut pour la première fois dans les arènes d’ Aigues-Vives, en juin 1919 où il s’émoussa la corne droite.
On le vit à Lansargues au mois d’Août suivant et à Lunel en octobre de la même année. Le Sanglier est devenu un fort bel animal dont les qualités de bon cocardier se sont affirmées avec l’âge. Sitôt qu’il parait en piste, ardent à l’attaque, il fait d’abord le vide autour de lui et maître du terrain, attend la provocation du "razeteur". Dès le cite, il fonce avec la rapidité d’un pur sang, accompagne dans une impressionnante poursuite l’audacieux jusqu’aux barrières posant les pattes sur le marchepied et lançant par delà le refuge un coup de tête d’un mètre de portée. C’est dire s’il ne faut pas s’attarder dans le saut, c’est dire si le Sanglier est un sérieux adversaire.
A ses cotés « L’Artilleur », « Le Duc », « Le Cerf » ; « Le Sigoulette » nous prouverons que la race des grands taureaux de Camargue ne meurt pas.
Nous nous en réjouissons.