« Pàti, moun brave biòu, simbèu de la manado,
D’un pau d’aquéu bon fun vène te coungousta.
Li tèms soun proun marrit, mai se l’erbo es rougnado,
Sabes que risques rèn quand siéu à toun coustat ».

A ma voues, lou dountaire à la tèsto entrougnado,
Se reviro subran. Souto vènt assousta,
Respirant lou prefum que ié tènde à pougnado,
Vèn vers iéu, coume un fòu pèr prendre soun gousta.

De si grands iue negras me fai milo tendresso,
E iéu, paure mesquin davans un tau bioulas,
Siéu ravi de soun èr, e ma man lou caresso.

Pièi, s’entournant plan-plan, car dèu èstre bèn las,
Moun vièi Pàti s’andraio alin, vers la cabano,
Que tout à soun entour i’a’no fourèst de bano.

Carle Naudot, dit « Lou Camarguen »

« Pâti, mon brave taureau, dompteur de la manade,
D’un peu de bon foin viens donc te délecter
L’hiver est rude, mais quoi que l’herbe soit raclée,
Tu sais que tu ne manques de rien quand je suis là. »

A ma voix, le dompteur à la tête renfrognée,
Se retourne soudain. Etant souvent à l’abri,
Il respire le parfum que je lui tends à poignée
Et vient vers moi comme un fou pour prendre son goûter.

De ses grands yeux noirs il me fait mille tendresses,
Et moi pauvre mesquin devant un tel taureau,
Je suis ravi de son air, et ma main le caresse.

Puis s’en retournant lentement, car il doit être bien las
Mon vieux Pâti se dirige là-bas du côté de la cabane
Où tout à son entour on aperçoit une forêt de cornes.