40/ Inégalité apparente dans leur caractère.
Ces même hommes, qui fêtent, avec tant de bienveillance, les hôtes qui vont les visiter aux champs semblent devenir beaucoup moins prévenants, en entrant dans la ville.
Leur amour propre souffrirait sans doute, de recevoir des convives dans des maisons mal montées ? Qui ne leur servent, en quelque façon, que de pied à terre.
On ne peut pas attribuer à d’autres motifs le changement qui opère en eux lorsqu’on les voit, hors de leurs logis, reprendre leur aménité habituelles et vous engager avec instance, d’entrer, où ils s’établissent la grande partie du jour : dans les cafés .

41/ Causes de corruption.
Les fermiers de la Camargue, heureux par leur genre de vie, le seraient davantage encore s’ils ne respiraient jamais qu’autour de leur mas.
Mais Arles étant le lieu de la réunion des travailleurs à gage, ils s’y transportent, les jours de fête et dimanches, pour louer les bras dont ils ont besoin, ils s’y pourvoient la plupart, pour le ménage, de domestiques complaisantes et laissent, presque dans le veuvage, leurs femmes à la ville.
Or la corruption règne, dans diverses classes de la société et conduit tôt ou tard les plus jeunes à un amour déréglé des plaisirs.
Du reste, ces travers, que le climat favorise et que l’exemple développe, trouvant une grande facilité à se satisfaire, ne deviennent pas, comme il arrive ailleurs, la source de vols et de crimes.
On observe, au contraire, qu’ils sont fort rares de la part d’habitants isolés de la Camargue

42/ Les habitants de Notre Dame de la Mer sont misérables
S’il s’y commet quelques vols, il est le fruit du besoin et de l’extrême misère, où sont plongés les habitants de Notre Dame de la Mer

43/ Ils prétendent occuper un lieu saint, Fête des Trois Maries
Ce bourg, relégué sur les bord de la Méditerranée dans le coin le plus aride et le plus marécageux de l’isle, prétend occuper la place où débarquèrent Marie Jacobé, Marie Salomé, Marie Sara leur servante.
C’est en leur honneur qu’ils les célèbrent, tous les ans, avec pompe , le 25e jour du mois de mai. Les bonnes gens du pays et des environs qui ont pour les trois saintes, une confiance sans bornes, accourent les implorer pour la guérison de leurs maux .
Des ex-voto tapissent l’intérieur de la chapelle qu’on leur a consacré, au premier étage de l’église paroissiale. C’est de cette chapelle, où reposent leurs reliques, qu’on fait descendre lentement dans le temple, à l’aide d’une machine, la cage de verre qui les renferma.
A la vuet de cette cage, les malades trépignent de joie, se pressent et tendent leur bras suppliants.
Une pierre à demi rongée ailleurs d’autres hommages, elle fût, au milieu du parement intérieur de l’église dont elle fait partie, incrustée à hauteur d’appui, par les patronnes du lieu . On s’approche en foule de cette pierre sacrée, que l’on assure préserver des fièvres ceux qui la rayent de leurs ongles.

44/ Mélange de religion et d’impiété dans cette fête, autres excès parmi le peuple des Saintes Maries.
Cependant, tandis qu’au sein de la nuit qui précède la fête, l’église retentit du champ d’hymnes pieux, des couples sacrilèges la souillent souvent, à la faveur des ténèbres.
Tel est l’habitant des Saintes Maries.
Rien n’est saint ni sacré pour lui. Comme homme civilisé, il n’a que les vices de l’état social. Comme homme de la nature, toute vertu lui est étrangère.
C’est un être essentiellement immoral, un vrai sauvage, qui souffre impatiemment de toute domination et dont la liberté farouche ne rêve que le pillage et ne respire que de la rapine.