" il est d’usage, dans quelques fermes, de ne donner aux gardians des manades, d’autres gages que la faculté de conduire avec le troupeau du maître, un certain nombre de bêtes dont l’accroissement leur forme un petit capital d’économie, qui leur procure tôt ou tard les moyens de former une manade particulière."

" plusieurs gardians de manades tiennent aujourd’hui, pour leur propre compte, un petit troupeau de 20 à 30 bêtes dont ils ont un soin particulier, et pour l’entretien desquelles ils louent des portions d’herbages dans les pâturages communs"
(extrait de : observation sur les chevaux et les haras de Camargue" en 1807 par Pader )

Après avoir perdu leur fonction agricole, la plupart des manades disparurent.
Quelques une subsistèrent grâce à leur maintien sur certaines propriétés mais surtout grâce aux gardians, ces éleveurs sans terre qui détenaient un petit troupeau.

Jusqu’en 1850, d’après les renseignements, très épars il est vrai, que nous possédons, il semblerait qu’il y ait eu deux catégories de manadiers :

  • a/ Des manadiers, peu nombreux, propriétaires de leurs herbages ayant de grands troupeaux.
  • b/ Des manadiers, probablement plus nombreux, locataires de leurs herbages, possèdant comme l’indiquent ce texte de toutes petites manades.

Après 1850, que s’est il passé ?
La revalorisation du taureau par le renforcement des traditions taurines ( en 1853 l’interdiction des courses de taureaux est levée) a permis, sans aucun doute, à certain petits petits manadiers locataire de leurs herbages d’agrandir leur manade, à de nouveaux gardians de constituer de petits troupeaux comme leurs prédécesseurs du début du XIXe siècle l’avait fait.

Entre 1850 et 1890, il semblerait qu’il y ait eu trois types de manades :

  • Des grandes manades, très peu nombreuses, appartenant en partie à des propriétaires terriens.
  • Des grandes manades, locataires à l’année de vastes superficies en herbages.
  • Des petites manades appartenant à des gardians au service des deux premiers types de manades.

Après 1890 :
Avec l’apparition des poètes et romanciers qui font l’éloge de la Camargue, de ses gardians, de ses manadiers, qui renforcent les traditions taurines du delta, qui créent le mythe de cette région, les trois types de manades que nous venons d’évoquer tendent à se multiplier.

Cependant, cette multiplication est freinée par la régression des herbages et dans une certaine mesure par la faible rentabilité des manades.

Le manque d’espace jusqu’en 1930 porte surtout préjudice aux gardians qui désirent créer leur propre élevage.
Ces derniers, au bas de la hiérarchie sociale des gens de la bouvine, ne trouvent plus d’espaces éloignés des cultures, suffisamment vastes pour permettre au bétail de vivre sans complément de nourriture.

Tous ces espaces, devenus bien rares du fait de leur régression, de leur morcellement sont occupés par les grandes manades.