En 1862, on inaugure une course landaise [1], en 1864, on produisit au lieu des taureaux Camargue habituels, des bêtes sardes, citées pour leur sauvagerie et leur audace [2].
Les entrepreneurs se recrutent toujours parmi les directeurs de théâtre en mal de recettes, tel Valgalier [3] ou encore dans la classe des portefaix et des limonadiers.
Aymard restaurateur à la Barthelasse, rénove complètement les arènes en 1862.

Il en coûte pour assister aux exploits des Mouraches et des Cataclé [4] un franc aux premières, soixante quinze centimes à l’ amphithéâtre et cinquante aux parterres, les femmes et les enfants payant moitié prix [5].

Les villages des environs d’Avignon suivent.
Vers les années 1858-1860, les fêtes votives du Pontet, de Sorgues, du Thor, de Cavaillon, comportent toujours un festival tauromachique [6].

Mais en 1864 est nommé comme préfet de Vaucluse, Bohat, gendre du premier ministre Rouher, auvergnat d’origine , peu enclin à tolérer des amusements dont il goûtait médiocrement le côté pittoresque et qui d’ailleurs se multipliaient à travers le département dans les conditions de sécurité très relatives.
Il prend, le 3 août 1864, un arrêté interdisant les courses de taureaux dans toute l’étendue de sa circonscription [7].

Cette mesure sévère fut scrupuleusement respectée [8] et, pendant 10 ans, la population d’Avignon se trouva sevrée d’une de ses distractions favorites [9].

Il faut attendre les grandes fêtes qui, en 1874, marquèrent le cinquième centenaire de la mort de Pétrarque, pour renouer avec cette tradition.
Devant le succès remporté par ce spectacle, aussitôt les sollicitations des imprésarios affluèrent.
La politique de l’administration est hésitante.
Tout dépendra du préfet et, en cette période, ces hauts fonctionnaires passent vite. De Brancion se montre résolument hostile et applique l’arrêté de 1864 [10] ; Doncieux en 1875, imité en 1877 et 1878, respectivement par Ducrest de Villeneuve et Spuller, ferment les yeux et on s’achemine vers un semi-libéralisme, lorsqu’ une série d’accidents vient tout remettre en question en 1881.

Deux personnes sont blessées en début de saison [11], plusieurs fois au cours de diverses représentations, les taureaux franchissent les barrières et sèment l’effroi dans le public [12], enfin le 31 juillet, un dénommé Marius Delorme boucher, est atteint d’un coup de corne par le taureau réservé aux amateurs et succombe deux heures après [13].
A la demande du ministre de l’intérieur, le préfet interdit immédiatement les courses. [14]

Une nouvelle fois on eut recours à l’asile Gardois et avec l’autorisation du maire de Villeneuve, sont aménagées des arènes dans une ancienne carrière, située à Pont d’Avignon, derrière la montagne de justice, entre la voie ferrée et l’ancien chemin des angles [15].
Dix mille personnes peuvent y trouver place dans une enceinte de trois cent quatre vingt mètres de circonférence extérieure, pour une piste de cent quatre vingt mètres de tour.

L’empresario Calamel assure la direction et promet des programmes mirifiques, comprenant des grandes courses espagnoles, des concours de manades, des ferrades, des exhibitions que quadrilles, parmi les plus réputés etc.…

Cet exil dura jusqu’en 1886 en dépit des réclamations du commerce local, en particulier de celles des limonadiers de la Barthelasse qui, les dimanches d’été, votaient s’enfuir la clientèle de l’autre coté du Rhône [16].

[1"Le mémorial de Vaucluse" ; 18 septembre 1862 N°1803

[2"Le mémorial de Vaucluse" ; 24 juillet 1864 N° 2021

[3"archives départementales du Gard" courses de taureaux 1846-1861

[4"Le mémorial du Vaucluse" 15 juin 1862 N°1803,
nous n’avons rien pu glaner sur ces favoris du public

[5"Le mémorial du Vaucluse" ; 17 juillet 1864 N° 1811

[6L’église dans le Vaucluse ne prendra jamais parti, contrairement à ce qui se passe dans le Gard où monseigneur Plantier, évêque de Nîmes, fustige les spectateurs de courses dans une lettre pastorale du 16 mai 1863

[7recueil des actes administratifs de la préfecture de 1864 N° 25

[8L’ île de la Barthelasse avait été rattachée au Vaucluse en 1856

[9on se flattait que la mode des courses de chevaux inaugurées en 1858, feraient perdre aux avignonnais leur passion des taureaux.

[10"j’ajouterais que si cet arrêté n’existait pas je le prendrais."

[11"L’Union du Vaucluse" 29 mai 1881 N°1330 et 3 juillet 1881 N°1347

[12"L’Union du Vaucluse" ; 22 juillet 1881 N° 1353 et 27 juillet 1881 N° 1355

[13"L’Union du Vaucluse" ; 03 août 1881 N° 1358

[14lettre du préfet du Vaucluse au ministre de l’intérieur, 04 août 1881

[15aujourd’hui cet emplacement est occupé par des villas.

[16lettre d’Horard restaurateur dans l’île