Comme en témoigne la photo reproduite en illustration (dans l’en-tête) de cet article et qui a été prise en 1920, c’est en 1795 que le premier sellier s’est installé dans ce quartier de Nîmes, à deux pas de la Porte de France.
Rien d’étonnant à cette situation géographique puisque c’est dans le "Faubourg Saint-Antoine", dont l’actuel Café de la Bourse est l’extrémité urbaine, que se trouvent les auberges où descendent les voyageurs.
Le " Logis des Trois Maures ", d’autres lieux plus discrets par lesquels transitent les bibles des protestants poursuivis, témoignent de l’intense activité de ce secteur de Nîmes, où les chevaux, notamment d’attelage, ont été innombrables à nécessiter les soins éclairés des bourreliers.

En 1914, Auguste Roman, abandonne ses champs d’Uzès et, le premier de la lignée des Pujolas dont il est l’aïeul maternel, s’installe face à ce qui sera la Chambre de Commerce.

En 1936, c’est Jean Pujolas qui, délaissant lui aussi l’Uzège, devient bourrelier... par amour puisqu’il épouse la fille d’Auguste. Il est évidemment spécialisé en sellerie et matériel agricole et dispose même, astuce suprême dans un département aussi " cavalier " que le nôtre, d’un véritable " service de dépannage " qui parcourt la campagne et se rend immédiatement utile.
Nous avons bien connu Jean Pujolas, dès notre entrée dans l’univers du cheval en 1967.
Discret. faussement bourru, serviable toujours et d’une compétence très attachante, il a marqué de son art du métier des générations de cavaliers, à l’heure où l’équitation se démocratisait.
Qu’il nous soit permis, ici, de rendre un sincère et fidèle hommage à ce grand artisan qui nous a, hélas, quittés en 1980.

Dès 1956, Jean-Claude Pujolas travaille aux côtés de son père. Certes, le cuir agricole périclite mais les loisirs-cheval naissent.

Gardian amateur chez Henri Aubanel, Jean-Claude bénéficie des conseils d’un ouvrier de haute compétence, Jean Bec, d’Aimargues.
Le troisième Pujolas apprend son métier dans l’atelier.

Depuis quelques années, il est assisté de son fils. Tout enfant, Frédéric le mercredi, répare les cuirs sous l’œil de son père et de son grand-père. Le Centre de Formation des Apprentis crée pour lui une section d’études.

Il remporte brillamment son CAP de sellier.
Cavalier au Club Saint-Georges mais aussi au Grand Mas d’Assas, amateur chez Roger Puig, au Mas de Mahistre, à Aigues-Mortes, le garçon a effectué son service militaire... dans la sellerie de la Garde Républicaine.
Il a laissé un grand souvenir, tant au Quartier des Célestins qu’à la Caserne Védrines qui abritent plus de 500 chevaux. C’est dire que ce jeune sellier a emmagasiné une expérience passionnante. Les selles de la République n’ont plus de secrets pour lui. Sans nul doute sera-t-il, dans quelques années, un brillant lauréat du Concours du Meilleur Ouvrier de France !...

Dans l’atalier des Pujolas, veille également une présence féminine, celle de Geneviève.

Elle a épousé. aussi, la tradition familiale.
A elle revient le délicat travail de constituer les tapis des selles Camargue. Elle utilise du drap muletier en pure laine, dont nos ancêtres faisaient leurs "chaussons " de sabots et dont on double encore les cuissardes.
L’intérieur du " couverton " est en feutre. Il est protégé, pour le contact avec le cheval, d’un treillis marron qui ne retient pas le poil et isole le feutre de la transpiration. Un tel tapis a dix ans de vie.

Les Pujolas ont les idées claires sur la situation du cheval en 1988, et donc sur leur métier qui en dépend.
Le " respect des principes " est leur philosophie.
Leur passion pour les traditions camarguaises en font des experts. Depuis 1983, ils réalisent eux-mêmes leurs arçons, en hêtre de sept centimètres d’épaisseur et contre-plaqué. Bien sûr, chaque selle est faite sur mesure et de leur atelier sortent toutes les pièces du harnachement traditionnel. Leur production franchit les frontières, pour aller habiller les chevaux Camargue exportés ou nés en Allemagne, Suisse. Italie.

A l’heure de l’Europe, en un temps où l’élevage du cheval méridional bat son plein et trouve réellement des débouchés, les Pujolas selliers de grande compétence, ont un avenir souriant devant eux.
Père et fils sont plus que jamais les experts recherchés d’un métier qui est aussi un art.

Créer une selle : 80 heures de travail effectif

• l’arçon de deux bois.
• la platine métallique qui délimite la taille de la selle et l’ensellement (le siège).
• les quartiers, doublés ou non. Le modèle doublé est toujours plus rigide.
• la partie du troussequin qui tient les cuisses et dont le " sur-mesure " par rapport à la morphologie du cavalier est capital.
• le faux-siège en laine.
• le siège en cuir monté mouillé, pour éviter les plis.
• le troussequin puis le pommeau.
• le système de sanglage, les panneaux, les coussinets, la croupière, la sangle, le surfaix, les sacoches.
• les cuirs :

  • quartiers : croupon de 5 mm d’épaisseur
  • siège : vachette de 2 mm d’épaisseur.


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Actuellement la Sellerie Pujolas n’est plus dans Nîmes, elle s’est déplacée à Caissargues, Av. de la Vistrenque, 30132 Caissargues, sur le rond-point.

Si son activité s’est diversifiée elle a garde la maîtrise sur la création de selles camargue toujours aussi belles (je ne fais pas de PUB, moi j’ai une Roux. NdR).

Selles actuelles :