La première devait avoir quatre cannes de long sur vingt pans de large, soit environ huit mètres sur cinq ; ce qui correspond assez bien aux proportions d’une cabane à usage d’habitation, divisée généralement en deux pièces. Une information de même nature nous est fournie par un autre texte du milieu du XVIIe siècle. (5) En revanche, la seconde, qui devait mesurer dix cannes de long sur trois et demi de large, soit environ 20 mètres sur sept, était certainement une jasso, c’est à dire une bergerie destinée à abriter un troupeau de moutons.
Nous remarquerons, par ailleurs, que la technique de construction utilisée n’est pas identique dans les deux cas. Pour la cabane du tènement de Port-Vedeau, le chapitre fait appel à un cabanier qui utilise comme principal matériau le scion de saule ou de Tamaris. Les poteaux de soutien (des fourquelo) sont en bois dur, orme ou chêne, les chevrons (doublis) en sapin. Il s’agit d’une construction entièrement végétale dont la toiture, bien sue le contrat ne le précise pas, était certainement en chaume de roseau (sagno). De plus, elle présentait la curieuse particularité d’avoir non pas une, mais deux absides arrondies (culato), ce qui est tout à fait exceptionnel, du moins à l’époque moderne. (6)

La construction de la grande cabane ou jasso du tènement du mas de Laval n’est pas confiée à des cabaniers, mais à des maçons d’Arles qui montent ses murs en pisé (tapio) de terre de grez comprimée entre deux branches espacées de deux pans, soit cinquante centimètres, au niveau du sol, Quand a la toiture, elle est prévue en chaume de roseau (sagno). Comme on peut le constater, le prix de la main-d’œuvre est identique dans les deux cas, alors que la surface de la cabane bâtie en tapio représente plus du triple de celle construite en vergan. On peut, semble t-il, en déduire qu’au milieu du XVIIIe siècle cette dernière technique était beaucoup plus onéreuse que la première et que les murs en pisé devaient le plus souvent être préférés aux murs en vergan. (7)

Quand au prix-fait du 22 janvier 1647 concernant la réparation de la cabane des salins de Badon appartenant à la ville d’Arles, il est encore plus riche en détails techniques. Il précise en effet que l’entrepreneur le cabanier Claude Quenin, sera tenu de refaire la toiture de l’édifice en remplaçant tous les éléments de charpente et de soutien (cancèu, doublis, fourquelo, condorso) qui sont en mauvais état de conservation, et en réemployant la partie restée saine du chaume de roseaux. Il est précisé que les divers matériaux constituant cette toiture seront assemblés avec des clous et des cordes, (treiaù) mais la couture (courduro) du dessus et de la façade sera faite, spécifie-t-on, en fil de laiton, ce qui prouve que cette technique de montage, contrairement à ce que pensait Fernand Benoit, était déjà utilisée au milieu du XVIIe siècle. (8)