"Nîmes, sous l’impulsion d’une direction honnête, avait pris une place honorable dans l’organisation des courses de cocarde et, de 1920 à 1924, défilèrent dans la piste Nîmoise les meilleurs cocardiers du moment. Quelques bon raseteurs du moment se déplaçaient vers Nimes et les courses du dimanche, sans avoir un intérêt comparable à celles de Lunel, n’en était pas moins très intéressantes.

Arles admirablement situé, au milieu des pâturages Languedociens et Provençaux, paraissait bouloir prendre la toute première place et nous reconnaissons bien sincèrement que les meilleurs concours furent organisés dans la cité Arlésienne, dont l’impresario fit un gros effort vers 1922 et 1923.

A l’heure actuelle, ces trois arènes ne donnent à peu près rien du tout en ce qui concerne tout au moins, la course provençale. Après un début de saison prometteur dont nous tenons à féliciter à nouveau les directeurs, les arènes de Lunel paraissent retomber dans la léthargie la plus absolue. Pourtant, il faut reconnaitre qu’un gros effort, un très gros effort avait été fait. Quoique très contrariés par un printemps pluvieux, les directeurs lunellois organisèrent sans se lasser de très belles courses.

C’est Lunel qui, cette année, avait vu les toutes premières grandes courses et c’est à Lunel que les grands cocardiers firent, cette année, leurs premières armes. Aussi nous n’arrivons pas à comprendre l’échec qui est venu mettre un frein à l’ardeur de ces messieurs. Après Vauvert, Lunel fermera ses portes et il faut que l’aficion soit bien diminuée dans la Vaunage et la Vistrenque pour qu’on ne trouve plus, dans le berceau de la course libre, trois ou quatre mille spectateurs pour venir applaudir, tous les dimanches, des cocardiers en renom. Les années précédentes, nous nous consolions un peu en attribuant les échecs lunellois et vauverdois à la mauvaise organisation, mais maintenant le mal nous parait bien plus grave, car, nous le répétons à dessein, les organisateurs de Lunel avait fait au début de la saison, un très bel effort qui ne méritait pas l’insuccès, mais, au contraire, la réussite.

L’avenir nous inquiète pour les courses dans cette région. Les jeunes gens, ne voyant plus de taureaux, ou presque plus, ne s’entraineront pas au razet, et alors qu’autrefois Lunel était une pépinière de bons raseteurs, nous risquons de ne plus en avoir aucun. A part Garonne, qui obtient pas mal de succès à l’heure actuelle, nous ne voyons personne autre parmi les raseteurs de premier plan, qui soit sorti de la région lunelloise. Tous les as ; ou soi-disant as, sont sortis de Beaucaire ou Arles. Ceux qui sont chargés de la défense de la course libre dans cette région feront bien de songer sérieusement à cela.

Je ne sais si je dois accorder une place aux arènes de Nîmes dans cette actualité. Jamais les Nîmois n’avaient été aussi peu favorisés et, si j’en crois pas mal d’aficionados, l’impression générale n’est pas tout à fait à l’avantage de l’empresa. Et il faut bien reconnaitre qu’il y a de quoi. A la fin de la temporada, alors que nous aurons un peu plus de temps, nous mettrons sous les yeux de nos lecteurs les courses libres organisées à Nîmes en 1927 et 1928. Ceux qui ne sont pas édifiés comprendront ainsi pourquoi les gradins de la plaza sont vides chaque dimanche. Nous affirmons que, depuis trois ans, aucune course libre intéressante n’a été organisée à Nîmes. Certes, il y avait quelques difficultés à vaincre, mais rien n’a été fait et, maintenant, nombreux, sont les dimanches où les portes des arènes restent fermées jusqu’au soir 8 heures, ou on les ouvre pour les spectateurs de cinéma.

C’est une chose déplorable que ce manque de spectacle taurin à Nîmes. En cinq ans, l’aficion Nîmoise a perdu plus de la moitié de sa force. Il y a plus des trois quarts des jeunes gens entre 15 et 18 ans qui n’ont pas vu une seule course libre et qui ne risque pas de s’intéresser aux courses a la cocarde, pas plus d’ailleurs qu’aux corrida, dont ils entendent assez mal parler depuis ces dernières années.

Les arènes de Nîmes vont être données en adjudication en fin de saison. Nous demandons ici très fort, et nous saisirons les sociétés taurines Nîmoises de cette requête, nous demandons que la course provençale ne soit pas traitée en parente pauvre par la nouvelle empresa. On n’a pas le droit de se moquer des Nîmois faisant afficher tous les dimanches une course de bachouchage, une course d’emboulés, ou bien une course de cocardiers avec 600 francs de primes. Il y a mieux que ça à faire et les arènes sont avant tout, pour les courses de taureaux ; le cinéma, le théâtre et toutes autres exhibitions doivent venir en deuxième lieu. Peut-être saurons-nous exiger que le directeur de 1929 s’en souvienne. Dans une ville de quatre-vingt cinq mille habitants, il se trouvera toujours une dizaine de mille amateurs de courses libres pour l’aider, s’il fait bien les choses. D’ailleurs nous en reparlerons.

Devons-nous parler de Nîmes, écrivons-nous plus haut ? En nous relisant, nous constatons que nous avons consacré deux feuillets à cette ville. Sans doute aurons-nous plus vite fini avec Arles.

Prétextant l’exiguïté des arènes, l’empresa arlésienne supprima les corridas intégrales en 1922. Il ne nous appartient pas à nous, chroniqueurs de la Provence taurine, d’étudier si cette suppression était indispensable. Nous n’avons jamais remis les pieds aux arènes d’Arles pour les corridas économiques et, si nous en croyons nos amis qui ont fait le déplacement, nous n’avons pas à le regretter. En tous les cas, après la suppression des corridas, l’impresario parut vouloir organiser de bonnes courses à la cocarde. Mais là aussi il n’y eut pas une longue suite et bientôt les Arlésiennes durent se contenter de peu de choses. Ce fut alors un défilé de tous les cocardiers des manades provençales, et quels cocardiers ! A tel point qu’aujourd’hui, devant la désertion des arènes, on en est arrivé, à Arles comme à Nîmes, et pour des raisons analogues, à ne plus avoir de courses. Ou plutôt si, on fait courir, les samedis et les dimanches, après diner, à 9 heures du soir, une vache de 7 à 8 mois pour les enfants de moins de douze ans. Les après-midi du dimanche s’écoulent sans aucun spectacle taurin.

En tous les cas, voilà trois arènes qui, pour des raisons diverses, sont fermées aux aficionados presque toute l’année. C’est bien malheureux, et d’autant plus que nous ne voyons pas comment les successeurs des impresarios actuels se débrouilleront pour attirer à nouveau les amateurs de courses libres aux arènes.
Profitant de cette situation anormale en Languedoc, les imprésarios de Provence sont venus de ce coté du Rhône et ont fait appel aux manadiers Cailarens pour l’organisation de leurs courses. Et comme ils paient plus cher, ce sera difficile pour leur souffler à nouveau les grands cocardiers. Il n’y a pas bien longtemps, les cocardiers du Languedoc ne passaient que très rarement le Rhône. Cette année je suis bien sûr que le Clairon, le Ramoneur, le Bandot ont couru plus souvent dans les plazas provençales qu’en Languedoc. Nous ne regrettons pas cela, nous déplorons seulement le manque d’aficion à Lunel et le manque d’organisation à Nîmes et à Arles

C’est incontestablement Beaucaire qui, en ce moment tient la tête. Les directeurs qui ne font pas de ces arènes une question d’intérêt, doivent dépenser pas mal d’argent, mais aussi donnent-ils des courses intéressantes et ils donnent à leur ville une animation inaccoutumée. Peu de Beaucairois vont aux arènes tous les dimanches, mais il y a des noyaux d’aficionados de Nîmes, d’Arles, de Saint Rémy, de Bellegarde, qui font le déplacement pour chaque course. Il y a beaucoup à critiquer dans la manière dont sont menées les courses à Beaucaire et nous y reviendrons certainement avant la fin de la saison, mais il y a une chose qui est indiscutable, c’est l’effort soutenu des organisateurs beaucairois pour satisfaire le public. Ne serait-ce que pour cela, on leur doit des félicitations et des encouragements.

Nous étions à Beaucaire dimanche, afin de revoir et de mieux juger le Ramoneur (...) (manque jonction entre le 7 et le 8) (…) parte comme un fou ; le taureau est maintenant un cocardier et nous nous plaisons à dire tout de suite que nous l’aimons mieux ainsi.
« Malheureusement, ces messieurs du crochet, qui saignent à blanc des cocardiers de second ordre, restent à la barricade dès qu’il y a dans le rond un taureau sérieux. Les gens qui, hier, sifflèrent le Ramoneur au moment ou revenait au toril, auraient mieux fait de siffler tous les razeteurs qui, froussards, étaient resté à l’écart. Que de fois, cette année, nous avons entendu siffler des cocardiers, alors que les razeteurs seuls étaient responsable de la course gâchée ».

A part une ou deux exceptions, plus ils sont payés et moins ils veulent travailler. C’est exactement comme les matadors.

Puisque nous avons dit un mot de cette course de Beaucaire, nous en profitons pour féliciter le toujours vaillant Bouterin. En un clin d’œil, il souffla deux garrots, au nez des autres razeteurs stupéfaits. Bouterin n’est plus un jeune, et la corne meurtrière qui l’a plusieurs fois châtié lui a enlevé une bonne partie de ses moyens physiques. Il est pourtant toujours sur la brèche et donne une bonne leçon de courage et de persévérance aux jeunes qui en ont besoin."