bedigas

Il y avait, dans le passé, beaucoup de troupeaux de moutons dans notre région ; et lorsque je discute avec les manadiers, les gardians ou simplement les afeciouna, j’entends avec un plaisir toujours renouvelé des anecdotes surprenantes. Tenez, par exemple, cet hiver, un après midi où plusieurs clubs taurins étaient réunis au Grand Radeau, le manadier Raynaud nous a raconté celle-là :

« Un jour, au Cailar, où nous avions le "droit de pati ", je ramenais les taureaux des prés et j’arrive sur le pont de la Clapière qui enjambe le Vistre. Malheureusement, ere pas tot sol !
Il y avait aussi Jules Dallo, le berger qui rentrait ses brebis dans l’autre sens. Voilà que nos bêtes se mélangent toutes sur le pont.

Vous auriez-vu cette affaire ! Plus de chien qui tienne ! Tu avais beau siffler et crier, pas res de faire ! On a fini par faire passer tout ça sur un même bord du Vistre, mai ero pas acaba ! Ces brebis, mon pauvre, elles étaient belles, grosses, avec (de la laine comme ça ! Et lourdes pardi ! Mes taureaux avançaient et quand elles étaient au mitan, pèu ! Un cop de bano dins aquelo lano e... hop, voilà les brebis dans l’eau du ruisseau. Et comme elles étaient lourdes, elles coulaient !

Avec le berger, on les a pêchées l’une après l’autre avec une corde. Quante trabalh ! Une belle panique ! On y a passé un brave moment ! »

Une autre fois, André Isaïa, afeciouna du Cailar, me racontait ce qu’il était arrivé chez Fernand Granon, au temps où il y avait une dizaine de troupeaux de moutons dans son village.

« Vers 1930, on chargeait les taureaux dans les cours des mas. Granon disait à sa mère combien on trierait de courses et il envoyait les bêtes choisies. De là, on embarquait les biòu dans le char, et en route !

Mme Granon disait aux bergers qui passaient : « Aujourd’hui, il y a 5 courses... »

Un jour, après qu’elle ait compté les 5 annoncées, mon père est rentré tranquillement. Nom de srt, vaqui qu’espelis una corsa de mai ! Et 29 brebis dans la cour se sont mélangées aux taureaux. C’était pas prévu, çà ! Quel remue-ménage ! Il a fallu trier biòu et bedigas, et pas une seule patte cassée ! »

Par contre, en 1962, Jean-Pierre Durieu qui gardait à cheval dans les Clapières, au Cailar, au temps où ce n’était pas encore clôturé, a vu arriver le troupeau de Jean Bouet de Vauvert. II a bien fait partir les taureaux, mais ce jour là, il y a eu 5 ou 6 brebis de perdues.