B et T : Là tu as répondu sur l’aspect qualitatif de la course avec ta façon de la mener mais il y a ensuite la manière d’appliquer le, ou les réglements que le président doit imposer. Prenons le cas d’une tenue blanche qui se frappe avec un arbitre de course ou le contraire. Arrêt de la course. Imaginons que l’organisateur se tourne vers le président et lui dise : « Tu reprends la course ».
As-tu déjà connu de telles injonctions ?

C. P. :Jamais.
J’ai toujours pris mes décisions, à tort ou à raison, et j’ai pris mes responsabilités.
Maintenant, comme je disais tout à l’heure, si l’organisateur n’est pas content il est tout à fait fondé à en prendre un autre à ma place.
Personnellement dans le cas du 15 août j’aurais pris une décision. Je n’aurais pas attendu que l’organisateur me dise « Il faut faire ci ou il faut faire mi ». J’aurais pris ma décision sans attendre que qu’on me dicte ce que je dois faire.
Il est certain que ce sont des décisions très difficiles à prendre puisqu’on peut nuire, après, à la carrière ou sur le déroulement de la suite de la course.
Ce sont des décisions difficiles et pour les prendre il faut un courage certain.
Dans le cas que je cite, je pense qu’on est allé trop loin car, comme je le dis toujours, on ne va pas à une course de taureaux pour assister à un combat de boxe.
On se frite dans les vestiaires ou à l’extérieur des arènes peut être mais en aucun cas devant les gens qui ont payé pour voir une course de taureaux. C’est l’image de marque de la Course Camarguaise qui est alors atteinte.

B et T : Mais si tu es sur le fait ?

C. P. : Si je suis sur le fait… j’en ai eu à reprendre des raseteurs, des tourneurs sans pour cela qu’on arrive à des décisions extrêmes. Il n’y a pas un certain respect des raseteurs envers certains présidents de course. La raison peut être que ces présidents de course-là ne respectent pas les raseteurs … ou certains raseteurs.
Du coup ils ne sont pas impartiaux. Je te rappelle ce que je disais au sujet du litige avec Chomel. Je préférais me disputer avec lui, tout en pensant qu’à l’époque ils étaient 100 ou 120 à l’Amicale des Raseteurs, je me fâchais avec un mais pas avec les 100 et quelques autres. Mais cette fois-là, j’avais raison. Je souligne que cela ne remettait nullement en cause la qualité de la personne.
C’est la leçon que j’en avais tiré : quand on veut être respecté, il faut être respectueux des autres.

B et T : Pendant la course le président a une place qui est différente de toutes les autres. De là où tu te trouves, comment va la Course ? Peut-elle reprendre la place qui était la sienne ?

C. P. : C’est vrai qu’on ne voit pas la course de la même façon suivant que tu es président ou spectateur.
Ce dernier peut se permettre, si il a une jolie fille sur sa gauche, de la regarder. Le président de course, lui, n’a qu’une « jolie fille » à regarder c’est le taureau en piste et les raseteurs.
Pendant l’heure et demie que dure la course il a son esprit focalisé sur ce qui se passe sur le sable.
Il ne peut quitter la piste des yeux.
Déjà qu’en étant attentif des faits marquants peuvent lui échapper, si jamais il se disperse en racontant des bêtises car j’en entends – on allume l’un, on allume l’autre – il faut un sérieux certain.
Il faut du professionnalisme !

B et T : Il faut donc une concentration à tous les moments. Cela se prépare ?

C. P. : Exactement.
Moi je suis à jeun quand je prends la présidence et je défie quiconque de dire le contraire en 25 ans de carrière que j’ai derrière moi.
J’en vois qui montent à la présidence après avoir fait un bon repas. Ont-ils les moyens de garder une concentration extrême ?
Un apéritif, un repas conséquent, un peu de vin et tu digères pendant la course…

B et T : Cet entretien tire à sa fin. Merci Philippe Chabanon d’avoir aussi aimablement accueilli "Bouvine et Traditions" et de nous avoir éclairé avec tes propos sans ambages sur la réalité de la fonction de président.
Enhorabuena pour ton retour que nous suivrons de près.