LES GOBE-MOUCHES [1]

Friands d’insectes et, plus particulièrement, de mouches qu’ils saisissent au vol, les oiseaux de la famille des Muscicapidés doivent à cette nourriture de prédilection leur nom scientifique aussi bien que leur nom vulgaire de Gobe-mouches (ou Gobemouche), en français et celui de Mousquihoun en provençal (nom qui s’applique également aux Bergeronnettes).

Leur régime devient frugivore lorsque les insectes se font rares et ils paraissent alors affectionner les figues, d’où leur autre nom populaire de Becfigues, Bèco-figo .

T. d. F.

Trois espèces de Gobe-mouches se rencontrent en Provence :

  • 1 Le Gobe-mouches gris (Muscicapa striata) de couleur brun cendré et dont la poitrine est légèrement rayée.
    On le nomme en provençal
    • Bèco-figo,
    • Pèlo-figo (qui pèle les figues),
    • Traucofigo (qui perce les figues),
    • Bouscarloquinsouniero (Fauvette-pinson),
    • Aragno (Araignée) en raison des toiles d’araignées dont il tapisse son nid, Fist, pour son cri,
    • Toco-l’ai,
    • Tocol’ase (qui touche l’âne) parce qu’on dit qu’il vient manger les larves vivant dans les plaies de l’âne et les mouches qui le parasitent,
    • Brando-alo (qui remue les ailes), en raison des battements incessants de ses ailes et de sa queue.
    • Mousquet-charlatan, Atrapomousco (qui attrape les mouches).
Gobe-mouches gris
  • 2 Le Gobe-mouches noir (Ficedula hypoleuca) dont le mâle a le dessus noir, avec une tache blanche sur l’aile, et le dessous blanc, le dos de la femelle étant brun.
    On le nomme Bèco-figo, Toco-l’ai, etc... comme le précédent.
Gobe-mouches noir
  • 3 Le Gobe-mouches à collier (Ficeula albicollis) qui se distingue du Gobe-mouches noir par un collier blanc et un croupion blanc.
    Espèce de passage en Provence et assez rare.
Gobe-mouches à collier

BECFIGUES ou TETES-NOIRES

Aristote et Pline à sa suite ont noté que les Ficédules (becfigues) se métamorphosent, changeant en même temps de forme et de couleur.
Nommés becfigues en automne, ensuite ils s’appellent Mélancoryphes (Têtes-noires).

Le dimorphisme sexuel [2] est très fréquent chez les oiseaux.
Mâles et femelles portent tout au moins, souvent, une livrée différente et les jeunes se différencient aussi généralement des adultes. Certaines espèces présentent d’autre part une variation de plumage selon la saison ou, tout au moins, au cours de la parade nuptiale.

L’identification d’une espèce dans ses diverses livrées est généralement assurée au niveau de la connaissance populaire. Le capuchon saisonnier d’une mouette ne masque pas son identité, sous ses livrées, pourtant fort différentes, de l’été ou de l’hiver, la même barge [3] est reconnue...

Mais, parfois, par suite des modifications saisonnières de la couleur du plumage, la détermination des espèces devient très difficile.
C’est ainsi que le Gobe-mouches à collier perdant son collier en automne ne se distingue guère du Gobe-mouches noir dans sa livrée d’été.
Le Gobe-mouches noir, lui-même, devient, en automne semblable à sa femelle au dessus brun-olive dont il se différencie par son front blanc. En été, il reprendra son dos noir et sa tête noire.

"Tête-noire" à la belle saison, Becfigue en automne...

Il faut beaucoup d’attention pour reconnaître le Gobe-mouches dans ses "métamorphoses" qui affectent aussi son régime alimentaire puisque cet insectivore devient frugivore.

LE SEMBLE-FIGUE

La chair des Becfigues est très appréciée, comme celle de tous les insectivores et d’autant plus qu’ils se nourrissent aussi de figues ce qui ajoute à leur succulence, et, bien que la chasse en soit à juste raison interdite, comme tous les "becs-fins", ils fournissent les brochettes des gourmets.

Le nom de Becfigue s’est étendu d’ailleurs à diverses espèces de passereaux qui sont chassés en automne.

  • "Au mes d’avoust, tout aucèu es bèco-figo"
    (En août, tout oiseau est un becfigue), dit-on.

On dit aussi : "Gras coume un bèco-figo",
(Gras comme un becfigue).

Et l’on connaît cet autre proverbe :
"Bèco-figo sadou, trobo li figo amaro",
(Becfigue rassasié, trouve les figues amères).

C’est sans doute aussi le Becfigue qui a servi de modèle à un oiseau imaginaire, lou sèmblo-figo , le semble-figue, qui a non seulement la forme et l’apparence d’une figue, mais qui pousse le mimétisme jusqu’à se suspendre par le bec à un rameau de figuier.
Si bien qu’il advient, conte-t-on aux enfants, qu’en croyant cueillir une figue, c’est un oiseau que l’on attrape.
Voir à propos de ces "oiseaux" particuliers, sur ce site : Tarnaga *

L’un des noms donné au Gobe-mouches, Toco-l’ase, (qui touche l’âne) permet d’évoquer un autre oiseau, plus ou moins imaginaire, ennemi-né de l’âne, l’Oiseau-boîteux.

[1Il existe également les gobemoucherons mais n’ont rien à voir avec les gobemouches.

[2Le dimorphisme sexuel est l’ensemble des différences morphologiques plus ou moins marquées entre les individus mâles et femelles d’une même espèce.

[3

barge adulte