"Qui ne s’est aperçu de la gêne et de l’ennui qu’éprouve tout homme simple du Midi à se découvrir la tête ?

L’homme du peuple ne salue jamais avec son chapeau et, s’il le quitte à l’église ou devant une procession, un enterrement, un personnage, c’est poussé par la force de ce qui lui a été appris, par la peur du ridicule, mais il n’attache à ce geste aucune signification de politesse.

Ce mouvement lui causerait même une impression de honte, presque d’indécence.

Dans les territoires où l’ usage gardian fait loi, on n’obtiendra jamais qu’un homme conscient de sa valeur enlève son chapeau.

Une dame anglaise, venue en Arles et devant laquelle on parlait de l’hospitalité noble et large, des manières courtoises, de la politesse recherchée des fermiers de Camargue, répliqua :
« Cela est vrai, et j’ai remarqué leur aisance à table, le samedi, lorsque, après le marché, ils envahissent l’hôtel Pinus et celui du Forum.
Mais comment, diable, se fait-il que pas un d’entre eux ne quitte son chapeau pour manger ?...
 »

Une autre fois, un jeune Saintin s’était placé dans un grand mas comme cocher.
La dame de la maison, s’étant aperçue qu’il n’y avait pas moyen de connaître la couleur de ses cheveux, finit par lui dire :

  • « Ecoute : quand je suis seule, mon beau, te voir garder ton chapeau pour t’adresser à moi m’est bien égal, car je n’en augure aucun manque de respect de ta part ; mais, lorsque tu te trouves devant des étrangères, je veux, par exemple, que tu le quittes !
    — « Oh ! Madame, répondit le Saintin, oh ! Madame, je n’oserais jamais !  »."